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Le Rassemblement national veut censurer cette œuvre de Miriam Cahn

Caroline Parmentier photographié le 19 juillet 2022 à l’Assemblée nationale.
Caroline Parmentier photographié le 19 juillet 2022 à l’Assemblée nationale.

POLITIQUE - Une nouvelle démonstration de la relation (compliquée) entre le Rassemblement national et la culture. Ce vendredi 17 mars, la députée RN du Pas-de-Calais Caroline Parmentier a publié une vidéo sur les réseaux sociaux pour dénoncer une œuvre de l’artiste suisse Miriam Cahn exposée au Palais de Tokyo, à Paris.

L’élue d’extrême droite cible un tableau qui « présente aux yeux de tous une scène de pédocriminalité », affirme-t-elle. « Ce tableau représente un enfant à genoux, les mains ligotées dans le dos, forcé à une fellation par un adulte », soutient Caroline Parmentier, qui se filme aux côtés de l’œuvre en question, comme vous pouvez le voir ci-dessous.

Or si l’on suit sa logique, sa propre vidéo pourrait donc être passible de poursuites. Car selon l’article 227-23 du Code pénal, « le fait, en vue de sa diffusion, de fixer, d’enregistrer ou de transmettre l’image ou la représentation d’un mineur lorsque cette image ou cette représentation présente un caractère pornographique est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende ».

Dans son message, la députée lepéniste demande à la ministre de la Culture, Rima Abdul-Malak, d’ordonner le décrochage de l’œuvre en question. Et sitôt lancée, la croisade de Caroline Parmentier a reçu le soutien de ses collègues du RN à l’Assemblée. « Il est hallucinant qu’on ait dû attendre l’élection de députés RN pour que ces œuvres soient enfin dénoncées », réagit par exemple Alexandre Sabatou, député de l’Oise.

« Le tableau ne représente pas un enfant »

Cela fait plusieurs jours que le tableau en question, baptisé « Fuck abstraction » agite les réseaux sociaux. Le 5 mars, l’animateur Karl Zéro était par exemple monté au créneau, déclenchant une avalanche de réactions indignées qui avaient conduit l’hôte de l’exposition, le Palais de Tokyo, à réagir. Et de rappeler un détail qui est loin d’être anodin : « Le tableau ne représente pas un enfant. »

Dans son communiqué, l’institution indique d’abord que « plusieurs messages d’avertissement sont disposés à l’entrée du bâtiment, de l’exposition, et tout au long du parcours pour avertir les visiteurs que certaines œuvres pourraient être de nature à heurter la sensibilité des publics ». Sur le fond, le musée affirme que « l’artiste représente ici une personne adulte aux mains liées, contrainte à une fellation ». Une scène « issue du contexte de la guerre » qui « vise à dénoncer ses actes barbares ».

Et le Palais de Tokyo cite directement l’artiste peintre : « Ce ne sont pas des enfants. Ce tableau traite de la façon dont la sexualité est utilisée comme arme de guerre, comme crime contre l’Humanité ». Toujours selon Miriam Cahn, « le contraste entre les deux corps figure la puissance corporelle de l’oppresseur et la fragilité de l’opprimé agenouillé et amaigri par la guerre ».

Soit une intention diamétralement opposée à l’interprétation faite et relayée par Caroline Parmentier et ceux qui y voient une promotion de la pédocriminalité, notion totalement absente de l’exposition. Au côté de l’œuvre on peut d’ailleurs lire cette précision, qui ne fait aucune référence à l’enfance : « Il s’agit ici d’une personne aux mains liées, violée avant d’avoir été tuée et jetée dans la rue. La répétition des images de violence dans les guerres ne vise pas à choquer, mais à dénoncer. »

Rasion pour laquelle le Palais de Tokyo, les commissaires de l’exposition et l’artiste « déplorent l’usage qui a pu être fait » du tableau en question, fruit de « l’absence de mise en contexte permettant d’accompagner sa compréhension ». À noter par ailleurs que la ministre de la Culture n’a juridiquement aucun pouvoir pour « décrocher » ce tableau comme le demande Caroline Parmentier.

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