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À un an des élections européennes, la NUPES cherche encore la formule

La Nupes doit répondre à plusieurs défis, un an après sa création express
La Nupes doit répondre à plusieurs défis, un an après sa création express

POLITIQUE - C’est une élection traditionnellement porteuse pour Europe Ecologie-Les Verts (EELV). En 2019, aux dernières élections européennes, ils ont réussi à placer 13 députés au Parlement européen, quand leurs concurrents socialistes et insoumis n’en avaient que 6 chacun et le PCF éliminé. Alors, pourquoi ne pas réitérer l’expérience le 9 juin 2024, date du prochain scrutin européen, dans un an exactement ? C’est en tout cas le souhait de la nouvelle patronne du parti, Marine Tondelier, qui a d’ores et déjà annoncé qu’elle présenterait une liste indépendante au scrutin, sans la Nupes.

Voilà qui met dans l’embarras LFI, qui pousse depuis le début pour « l’union » à cette élection qui leur est traditionnellement peu favorable (6,31 % en 2019) et ce, malgré les divergences majeures qui existent avec les autres partis de gauche, à commencer par le PS et les Verts.

C’est pourquoi Jean-Luc Mélenchon, qui prétendait encore tout récemment par la voix de son entourage « écrire un livre et ne pas accepter de sollicitations médiatiques », a décoché une flèche dont il a le secret. Lundi 5 juin, un an avant le prochain scrutin européen, quasiment jour pour jour, le leader insoumis met en garde ses partenaires de la Nupes (parmi lesquels figurent EELV, le PS ou encore le PCF) dans un entretien à 20 minutes. « S’il n’y a pas d’union aux européennes, il n’y en aura pas non plus aux municipales. Pourquoi y en aurait-il une à la présidentielle ? Les petits intérêts de partis ont des limites ! », tance-t-il, en jugeant « possible » que la Nupes se fracasse sans cette union aux élections européennes.

L’union, pour arriver en tête ?

Son argument ? Que la gauche unie arrive en tête du scrutin - un seul tour, à la proportionnelle - devant les listes de Le Pen et Macron et ainsi envoyer un signal national d’espoir : la gauche peut être première. « Nous avons la possibilité d’être en tête, que tout le peuple voit qu’il y a une direction possible pour son futur », argumente-t-il.

En 2019, le RN et Renaissance étaient arrivés en tête, avec respectivement 23,34 et 22,42 % des suffrages, quand la première liste de gauche - EELV - se hissait péniblement à 13,48 % des suffrages. Et Mélenchon d’insister, malgré les refus clairs et nets de Tondelier : « Nous avons même proposé de donner la tête de liste (pour les européennes aux écologistes), la réponse a été brutale et violente. Madame Tondelier nous traite de « forceurs » ! Imaginez qu’on réplique sur ce ton ! ».

« Ce n’est pas l’Europe qui intéresse Jean-Luc Mélenchon. Il utilise la campagne » - David Cormand, eurodéputé EELV.

« Ce n’est pas l’Europe qui intéresse Jean-Luc Mélenchon. Il utilise la campagne pour mettre en demeure les forces de la Nupes soit de se plier à lui, soit de porter la responsabilité de la fin de la Nupes. Il fait toujours comme ça », répond David Cormand au HuffPost, député EELV sortant. Il assure qu’en 2027, son parti « sera responsable pour deux » et plaidera pour une candidature unique de la gauche à la présidentielle, comme l’a déjà annoncé Marine Tondelier sur tous les tons depuis son élection à la tête du parti.

... Ou la division pour obtenir plus de sièges ?

De son côté, la sénatrice écologiste Mélanie Vogel confirme que son parti présentera aux élections du 9 juin 2024 une liste de « candidates et candidats qui partagent le projet écologiste ». Elle n’exclut cependant pas « des candidatures d’ouvertures », moyen de tenter de récupérer des personnalités des autres partis, et ainsi d’organiser la gauche autour d’eux, au moins pour ce scrutin. C’est l’argument principal des Verts, également défendu par François Hollande en privé : « C’est un scrutin proportionnel à un tour. On aura plus de sièges de gauche au Parlement européen en partant séparés ». Argument réfuté par Mélenchon qui pense que la division de la gauche favorisera l’abstention.

Reste le Parti socialiste. Olivier Faure a pris acte dès le mois d’avril qu’il n’y aurait « pas de listes Nupes aux européennes », mais entend bien construire des alliances. Ainsi, a-t-il décidé de se donner du temps, afin « de travailler des propositions », comme il l’a dit au Parisien le 6 juin. « En octobre, nous verrons avec qui nous sommes capables de discuter et de partager un projet ». Sans doute échaudé par le score du PS en 2019 (6,19 % ), le premier secrétaire cherche la bonne formule et est pressurisé par son opposant interne, Nicolas Mayer-Rossignol, le maire de Rouen, qui a échoué d’un cheveu au dernier congrès (émaillé de triches de toutes parts).

Anti Nupes, Nicolas Mayer-Rossignol l’est encore plus pour les élections européennes : « Nous sommes pro-Européens, pour le renforcement de l’Europe de la Défense et pour soutenir les Ukrainiens face à Vladimir Poutine. Tout ça dans le cadre de l’OTAN. Nous ne pouvons pas nous allier avec un parti qui n’est pas sur cette ligne », met-il en garde en désignant LFI. Si le maire de Rouen n’est pas contre une alliance avec EELV, il propose de reprendre Raphaël Glucksmann pour emmener la liste socialiste si les discussions avec les écologistes n’aboutissaient pas. « Ou pourquoi pas Olivier Faure. Quand on est chef, on porte le drapeau. Ce serait courageux, cela aurait du panache ! », lance-t-il. Une manière de défier son adversaire qui lui a déjà proposé le poste de chef de file, mais que Nicolas Mayer-Rossignol, en pleine guerre de parti, avait refusé pour « ne pas cumuler avec la mairie de Rouen » et « parce qu’on ne m’achète pas avec des postes ».

Emmanuel Maurel en embuscade

Enfin, au PCF, on joue aussi la montre. Deux votes internes sont attendus. Le premier, les 2 et 3 juillet pour définir une « orientation de fond » et « désigner un chef de file » au conseil national, et un autre en octobre pour acter la stratégie. Tout porte à croire que le parti communiste ira de son côté aux élections européennes, malgré son très mauvais score de 2019 (2,49 %). « Ce qui nous importe, ce sont les idées. Aux européennes, on parle d’Europe. Donc mettre sur une même liste des gens qui pensent tout et son contraire sur l’Europe ne serait pas cohérent », justifie Ian Brossat, tête de liste en 2019, mais qui ne rempilera pas. Des noms circulent dans la « nouvelle génération » pour prendre le relais comme le porte-parole Léon Deffontaines, 27 ans.

Et comme si ce n’était pas assez compliqué comme ça, le député européen sortant réélu en 2019 sur la liste LFI de Manon Aubry, Emmanuel Maurel (ex-PS) réfléchit à monter sa propre liste avec son mouvement « Gauche républicaine et socialiste », avec pourquoi pas des candidatures extérieures.

On s’éloigne donc à grand pas d’une ligne commune, même si certains attendent de voir « le contexte national » qui pourrait le justifier à l’automne, afin de pressuriser le RN et la Macronie et envoyer un signal clair aux électeurs de gauche. Si l’option de la division était retenue, elle pourrait aussi jouer le rôle d’« accélérateur de particules », notamment en vue de 2027, comme le pressent Sébastien Jumel, député communiste de Seine-Maritime : « On va prendre conscience qu’on est troisième, éclatés façon puzzle derrière le RN et Macron, ça peut faire un effet révélateur ».

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