Le biopic sur Marinette Pichon rappelle que ses combats pour les femmes dans le foot sont toujours d’actualité

Garance Millier incarne Marinette Pichon dans son biopic réalisé par Virginie Verrier.
Garance Millier incarne Marinette Pichon dans son biopic réalisé par Virginie Verrier.

CINÉMA - « Il y a tout à construire encore pour le football féminin en France ». Non, ce n’est pas nouveau mais Marinette Pichon préfère le répéter. Un biopic simplement intitulé Marinette et réalisé par Virginie Verrier est au cinéma depuis ce mercredi 7 juin. Il raconte la vie de la plus grande attaquante des Bleues.

Celle qui a grandi à Bar-sur-Aube (Aube) et qui est aujourd’hui âgée de 47 ans devient donc la première sportive française, homme et femme confondus, à avoir un film retraçant son histoire sur grand écran.

Depuis toute petite, Marinette Pichon est passionnée de football mais a aussi un caractère bien trempé. Dans ce biopic vintage, on (re)découvre le parcours difficile de la joueuse, interprétée par Garance Millier (Titane, 2021) pour arriver au sommet du foot français. À plusieurs reprises, le film dépasse le cadre du football et nous plonge dans différents combats menés par Marinette.

Aux côtés d’un entraîneur - joué par Fred Testot - qui fait office de figure paternelle, Marinette évolue jusqu’à ses 16 ans au sein d’une équipe mixte mais après plus aucune dérogation n’est accordée à son club. Avec l’aide de sa mère et sa sœur, elle atterrit à Saint-Memmie Olympique, où elle y restera pendant une dizaine d’années jusqu’à sa montée en première division.

Ces premières années dans le foot féminin amateur n’ont pas été faciles pour Marinette. Entre un père alcoolique et violent, la jeune femme aurait pu devenir une vraie « bombe humaine » - comme la chanson de Téléphone qui fait aussi de bande originale au film. La condamnation de son père en 2000 pour agressions sexuelles aurait pu être le coup fatal.

Une carrière en équipe de France compliquée

Virginie Verrier n’a pas choisi la footballeuse - aux 112 sélections en équipe de France - au hasard. « Marinette Pichon, légende du football français, s’est imposée à moi parce qu’au-delà du sport, son parcours personnel, que j’ai découvert traversé par des thématiques extrêmement fortes et en totale connexion avec notre époque, prend aux tripes. » confie la réalisatrice dans un communiqué.

En effet, son parcours ne ressemble à aucun autre. Arrivée en 1994 à Clairefontaine, Marinette Pichon a été victime de harcèlement de la part d’autres joueuses du groupe pendant plusieurs mois. Elle refuse alors une sélection et se voit suspendue pendant six mois de toute activité liée au football. Un épisode émouvant où l’on ressent l’incompréhension de Marinette Pichon. Après avoir éprouvé de la rancœur, elle accepte finalement de retourner en équipe de France pour participer à l’Euro 2001.

Marinette Pichon (Garance Millier) et sa mère (Emilie Dequenne) à leur arrivée aux États-Unis.
Marinette Pichon (Garance Millier) et sa mère (Emilie Dequenne) à leur arrivée aux États-Unis.

Un an plus tard, elle signe à Philadelphia Charge et devient la première footballeuse - toujours homme et femme confondus - à signer aux États-Unis. Là-bas, Marinette Pichon est une joueuse professionnelle et gagne des milliers de dollars par mois. Le foot féminin est pris au sérieux par le public et les médias. Les organisations y injectent beaucoup d’argent. Une situation bien différente de la France.

En avance sur son temps, elle permet d’exporter la ligue de football féminine américaine (WUSA) en Europe. Aussi passée par les Wildcats du New Jersey, son rêve américain s’écroule définitivement en 2004 lorsque la WUSA fait faillite.

Cette aventure outre-atlantique, Marinette en gardera un bon souvenir et repartira avec plusieurs trophées. En 2003, les États-Unis avaient même accueilli la Coupe du monde féminine, une grande première pour les Bleues et Marinette Pichon.

Mais dans la sphère privée, c’est une période beaucoup plus compliquée. Grâce au film, on découvre aussi sa relation avec une femme alcoolique et violente comme son père l’a été. Cette rencontre est un véritable électrochoc pour Marinette.

Une vie de combat

À son retour en France, personne ne l’a oublié. Marinette Pichon signe au Juvisy FCF et devient la meilleure buteuse du championnat en 2005 avant de remporter le titre de championne de France en 2006. En dehors des terrains, elle est très souvent questionnée sur son homosexualité, encore - et toujours - tabou dans le monde du foot.

Durant toute sa carrière, Marinette Pichon a aussi pris la parole et demander via les médias d’obtenir le statut de joueuse professionnelle pour elle-même et ses coéquipières. « Comment voulez-vous qu’on fasse le poids alors que nous, on n’est même pas payée » avait-elle lancée à un journaliste après la défaite contre l’Angleterre, qui avait empêché les Bleues de participer à la Coupe du Monde de 2007.

Marinette Pichon interprétée par Garance Millier (numéro 9) lors d’un match avec l’équipe de France féminine.
Marinette Pichon interprétée par Garance Millier (numéro 9) lors d’un match avec l’équipe de France féminine.

Marinette Pichon raccroche les crampons la même année après avoir marqué 300 buts durant toute sa carrière. Ce biopic retrace le parcours d’une footballeuse avant-gardiste et qui a lancé plusieurs bouteilles à la mer, aujourd’hui toujours sans réponse.

Une Coupe du Monde 2023 en danger

Le statut de joueuse professionnelle n’a toujours pas été accordé aux Françaises, contrairement à nos voisins européens. En France, le football féminin n’est pas rattaché à la Ligue de Football Professionnelle (LFP) mais à la Fédération Française de Football. Alors les seuls statuts accordés sont ceux d’amatrices, de semi-pro ou un contrat fédéral.

À cause d’un différend entre les chaînes de télévision françaises et la FIFA, la Coupe du Monde féminine, qui débutera le 20 juillet prochain en Océanie, n’a toujours pas de diffuseur. TF1 et M6 se renvoient la balle ou plutôt le problème.

Un véritable « scandale » pour Marinette Pichon qui a même lancé une pétition afin de faire avancer les choses. Celle-ci a déjà atteint les 115 000 signatures. La deuxième meilleure buteuse des Bleues, juste derrière Eugénie Le Sommer, rassemble toutes ses forces afin de trouver un diffuseur à temps.

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