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Que contient la "loi anti-squat" examinée ce lundi à l'Assemblée nationale?

Cette proposition de loi portée par les groupes de la majorité présidentielle vise à punir plus fortement les squatteurs et à réduire drastiquement les délais de justice.

Un coup fatal porté aux squatteurs? Ce lundi, l'Assemblée nationale débute l'examen d'une sensible proposition de loi anti-squat portée par les groupes de la majorité présidentielle Renaissance et Horizons. Faute de majorité absolue à la chambre basse du Parlement français, le texte pourrait être adopté avec l'aide des voix des députés LR et RN, et ce malgré l'opposition de la gauche et des associations.

"J'ai reçu des dizaines de témoignages de petits propriétaires en contentieux depuis deux, trois, quatre ans. Beaucoup de citoyens s'indignent de voir ces victimes de squats ou d'impayés. Cela crée un sentiment d'injustice et d'impunité", affirme l'auteur du texte, Guillaume Kasbarian, auprès de l'AFP.

Des peines plus lourdes

En introduction de cette proposition, les députés insistent sur "la forte émotion que suscitent chez nos concitoyens ces exemples d’incivilité et d’injustice vécues au quotidien".

Sur le fond du sujet, le texte propose de tripler les sanctions encourues par les squatteurs jusqu'à 3 ans de prison et 45.000 euros d'amende au lieu d'actuellement un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende selon le premier alinéa de l’article 226‑4 du code pénal.

"Actuellement un squatteur risque un an de prison et 15.000 euros d'amende. Mais le propriétaire qui change la serrure risque 3 ans et 45.000 euros", justifie Guillaume Kasbarian, également président de la commission des Affaires économiques.

Sa proposition de loi prévoit en retour la même peine pour ceux qui se font passer pour un propriétaire dans le but de louer un bien. Il précise que le délit d'introduction dans le domicile concerne aussi les résidences secondaires, et étend la procédure d'expulsion express, sans recours à un juge, aux logements vacants, vides de meubles.

Des délais raccourcis

Dans un second temps, le texte réduit aussi la durée de la procédure judiciaire, et prévoit que certains délais pouvant être accordés par un juge ne soient désormais envisageables que si le locataire en fait lui-même la demande.

Dans le détail, le texte réduirait alors "de deux mois à un mois le délai minimal entre l’assignation au titre de l’audience et le jour de l’audience."

De plus, les élus souhaitent également réduire les recours "aux occupants dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement" mais dont le relogement "ne peut avoir lieu dans des conditions normales." Actuellement comprise entre trois mois et trois ans, la proposition suggère une réduction de ce délai "entre deux mois et un an."

"Si tant de propriétaires demandent garanties, cautions et justificatifs, c'est qu'ils savent que les procédures sont tortueuses", martèle Guillaume Kasbarian.

"Nous maintenons le recours au juge et la trêve hivernale. Il est normal que des personnes qui ont des difficultés se voient accorder un délai. Mais pas normal que ces procédures durent cinq ou six ans", convient-il toutefois.

Un texte qui divise

Les débats autour de ce texte controversé devraient laisser lieu à de belles passes d'armes. En l'absence de majorité absolue, le camp présidentiel devrait se tourner vers sa droite pour faire voter le texte. "Ca fait bien longtemps qu'on fait des propositions allant dans ce sens", souligne la députée Annie Genevard (LR). En commission, elle a fait adopter un amendement pour "assimiler le squat à un vol", une disposition "essentielle" qu'elle espère étendre aux cas d'occupation de locaux à usage économique.

"Le groupe Rassemblement national approuve cette proposition de loi", avait déclaré en commission sa députée Géraldine Grangier. Quant au gouvernement, s'il a apporté son soutien au texte, il pourrait encore peser en séance pour l'équilibrer.

Les députés insoumis, communistes et écologistes sont eux vent debout, même si certains députés ultramarins de gauche soutiennent des amendements pour des mesures fortes en Outre-mer.

"Cette loi est une fabrique de SDF", dénonce la députée LFI Danielle Simonnet, dont le groupe entend déposer une motion de rejet préalable au texte. Son collègue François Piquemal avait fustigé en commission une proposition de loi "fait divers", au regard des quelque "170" procédures d'expulsion menées à terme en 2021 mentionnés par Guillaume Kasbarian.

"Si nous tenions ce genre de raisonnement, nous n'aurions rien fait contre les marchands de sommeil, eux aussi minoritaires", lui a rétorqué ce dernier. Le ministère du Logement avait estimé en 2021 que "le squat n'est pas un phénomène massif en France".

Article original publié sur BFMTV.com

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