Crash, 40 jours seuls, sans adulte: comment 4 enfants ont pu survivre dans la jungle amazonienne?

"Il n'y a aucun mot qui peut représenter cet exploit là". Lesly, Soleiny, Tien Noriel et Cristin ont été retrouvés vivants vendredi 9 juin par les sauveteurs, alors qu'ils erraient seuls depuis 40 jours dans la jungle amazonienne en Colombie.

"Ils étaient déshydratés (...) Mais en général leur état est acceptable. Ils sont hors de danger", s'est même félicité le ministre de la Défense Ivan Velasquez

Les quatre enfants, âgés de 1 à 13 ans, étaient recherchés depuis le crash le 1er mai du petit avion Cessna 206 à bord duquel ils voyageaient avec leur mère, le pilote et un proche. Les trois adultes sont décédés dans l'accident. 40 jours seuls, sans adulte, au milieu de la jungle et dans un état "acceptable". Par quel miracle?

Seulement "quelques lésions cutanées et piqûres"

"C'est même plus qu'un miracle", estime Damien Lecouvey. Spécialiste de la survie et consultant pour plusieurs émissions télévisées, il confie ce samedi soir sur BFMTV n'avoir "jamais entendu d'histoires comme ça".

William Wadoux, consultant en projet de développement et coorganisateur de stages de survie en Amazonie, souligne également sur BFMTV la spécificité du lieu, "vallonné" et avec 80% d'humidité ambiante".

"Imaginez l'épreuve: vous perdez trois adultes dans le crash de l'aéronef. vous êtes dans l'un des biotopes les plus difficiles de la planète avec des contraintes climatologiques extrêmes: des températures élevées et des besoins hydriques importants", a détaillé Damien Lecouvey sur notre antenne.

Pour lui, le pemier danger reste avant tout "le risque de coup de chaleur lié à la déshydratation", particulièrement pour le tout jeune enfant âgé de moins d'un an. "Plus les jours passent, plus la capacité de survie diminue. 40 jours, c'est énorme".

Sauf qu'à part "quelques lésions cutanées et piqûres", les enfants ne présentent "pas de pathologie ou une quelconque situation de santé dégradée", a indiqué un médecin militaire. "Ils sont dans une condition stable, des examens sont en cours" et un protocole de rénutrition leur est administré, avec un soutien psychologique.

Les enfants originaires d'un groupe indigène

La communauté dont font partie les enfants y est-elle pour quelque chose? Originaires du groupe indigène Uitoto, les enfants sont habitués à la vie dans la jungle et savent comment y survivre, selon leurs proches.

"C'est l'un des groupes ethniques qu'on retrouve dans la partie ouest de l'Amazonie", indique William Wadoux sur BFMTV, "les parents vont toujours chercher les choses en forêt accompagnés de leurs enfants. Il s'imprègnent alors de ces choses-là et savent bien repérer quels fruits manger ou quelles plantes prendre pour certains usages".

"Leurs peurs ne sont pas exactement les mêmes que nous pourrions avoir dans ces endroits-là", estime-t-il encore sur notre antenne.

Pour l'Organisation nationale des peuples Amérindiens de Colombie (Opiac), "la survie des enfants est la démonstration de la connaissance et de la relation qu'entretiennent les indigènes avec la nature, un lien enseigné dès le ventre de la mère".

Tous les officiels ont loué la coopération sur le terrain des commandos et des volontaires indigènes, dans un pays où des décennies de conflit interne et violences ont plutôt laissé de la défiance entre ces deux acteurs. "Sans les indigènes, leur expérience et leur savoir de la jungle, ce résultat inespéré n'aurait pas pu être atteint, tous les militaires le reconnaissent", a souligné le ministre Velasquez: "ils ont été les guides de nos commandos dans la jungle".

Leur survie possible grâce aux connaissances de l'aînée

Lors de sa prise de parole, le ministre de la Défense a notamment rendu un hommage appuyé à l'aînée de la fratrie, Lesly: "c'est grâce à elle, sa valeur et son leadership, que les trois autres ont pu survivre avec ses soins, sa connaissance de la jungle".

"Je pense que c'est vraiment ça qui les a tous sauvés", estime sur notre antenne Nicolas Mathieux. Cet aventurier et explorateur estime que cet heureux dénouement "ne serait jamais arrivé avec des gens qui ne connaissent pas un minimum la forêt et la jungle, ce serait impossible".

"Cela va être intéressant de voir ce qu'ils ont consommé", s'interrogé également William Wadoux sur BFMTV.

"Enfants de la brousse", ils "ont survécu au début en mangeant un peu de farine (qu'il y avait à bord de l'avion accidenté), puis des graines", selon le grand-père des enfants rescapés. Reste un "mystère" pour William Wadoux: l'alimentation de la petite Cristin âgé de moins d'un an.

"À cet âge là ils ont besoin de lait maternel, il est probable qu'ils aient utilisé un équivalent qui provient de lianes", évoque le coorganisateur de stages de survie en Amazonie, "sans doute certaines plantes ont pu permettre à l'enfant de survivre et de tenir le temps suffisant pour être récupéré".

Article original publié sur BFMTV.com