Donald Trump inculpé par la justice fédérale: pourquoi cela n'entrave pas sa candidature pour 2024

Donald Trump inculpé par la justice fédérale: pourquoi cela n'entrave pas sa candidature pour 2024

"Je suis un homme innocent". Donald Trump a fait savoir jeudi 8 juin qu'il avait été inculpé dans l'affaire des archives de la Maison Blanche. "La corrompue administration Biden a informé mes avocats que j'ai été inculpé", a écrit l'ancien président sur son réseau social Truth Social.

Il a précisé avoir été convoqué devant un tribunal fédéral de Miami mardi pour sa deuxième inculpation, à la veille de ses 77 ans. En tout, il est visé par 37 chefs d'accusation, notamment pour "rétention d'informations portant sur la sécurité nationale" et "entrave à la justice".

"Jamais je n'aurai cru cela possible pour un ancien président des États-Unis, qui a reçu plus de voix que n'importe quel autre président en exercice dans l'histoire de notre pays et qui est devant tous les candidats, démocrates et républicains, dans les sondages pour l'élection présidentielle de 2024", a encore écrit le milliardaire américain sur son réseau social.

Trump dénonce une "interférence électorale"

Pour le spécialiste de la politique américaine Corentin Sellin, le républicain continue d'écrire "l'histoire judiciaire et politique des États-Unis": Donald Trump est effectivement le premier ancien président américain inculpé par la justice fédérale

"On peut aussi voir ça comme une avancée démocratique [...] personne n'est au-dessus des lois, même un président", explique le professeur agrégé d'histoire sur Franceinfo ce vendredi.

Une loi de 1978 oblige les présidents et vice-présidents américains à transmettre l'ensemble de leurs emails, lettres et autres documents de travail aux Archives nationales. Donald Trump et ses avocats, dans un premier temps sollicités par les Archives nationales, avaient finalement envoyé plusieurs documents mais les Archives nationales ont malgré tout demandé une enquête à la justice fédérale américaine. Des agents du FBI ont alors mené une perquisition à Mar-a-Lago et ont saisi de nombreux autres documents. Cette enquête débouche aujourd'hui sur l'inculpation de l'ancien président.

Par ailleurs, une autre loi, sur l'espionnage, interdit aux agents américains de conserver des documents classés confidentiels dans des lieux non autorisés et non sécurisés, ce qui semble être le cas pour Donald Trump.

"C'est de l'interférence électorale au plus haut niveau, du jamais-vu" a encore réagi Donald Trump dans une vidéo, "les démocrates tentent de détruire ma réputation pour remporter la prochaine élection".

Être poursuivi ou condamné n'empêche pas d'être candidat

Détruire une réputation à défaut de pouvoir le rendre inéligible? L'article 1519 du titre 18 du Code des États-Unis prévoit une peine maximale de 20 ans de prison en cas d'obstruction à une enquête fédérale par la destruction, la falsification ou encore la dissimulation de documents.

Mais aux États-Unis, être inculpé et même condamné pour un délit ou un crime n'interdit pas d'être candidat, élu ou d'occuper une fonction officielle. "Trump peut-il faire campagne même en prison? Oui et ça a déjà été fait", souligne Politico qui reprend le précédent Eugene Victor Debs. En 1920, ce candidat du Parti socialiste d'Amérique s'était présenté l'élection présidentielle depuis sa cellule d'Atlanta en Géorgie. Il avait alors recueilli près d'1 million de voix.

Si la justice ne peut freiner les ambitions électorales de Donald Trump, les Américains le désavoueront-ils en 2024?

"Cela (l'inculpation, NDLR) peut être un atout politique" estime Corentin Sellin auprès de nos confrères de Franceinfo, "Donald Trump fonde tout son message politique sur un complot de l'État contre lui".

L'ancien président visé par d'autres affaires

En outre, il ne s'agit pas la seule enquête autour de Donald Trump. En mars dernier, l'ancien président républicain avait été inculpé au pénal pour une affaire remontant à 2016. Il lui est reproché d'avoir versé une somme importante - avec les fonds de sa campagne présidentielle de l'époque - à Stormy Daniels. Il est soupçonné d'avoir eu une liaison extraconjugale avec cette actrice et réalisatrice de films pornographiques et d'avoir cherché à acheter son silence. Des accusations que réfute l'intéressé.

Et c'est sans compter sur l'enquête en cours autour de l'assaut du Capitole, celle sur les tentatives d'influence de l'élection présidentielle de 2020 en Géorgie ou encore la condamnation de la Trump Organization en janvier dernier à New York.

Ces frasques judiciaires ne semblent toutefois pas freiner Donald Trump, bien décidé à prendre sa revanche face à Joe Biden en 2024. Ainsi le Washington Post, dans un papier d'opinion relayé par nos confrères de RFI, estime que "nous faisons face à une inconfortable réalité – Donald Trump est à la fois inculpé par la justice fédérale et le candidat en tête pour la nomination républicaine à la prochaine présidentielle".

"La première inculpation (affaire Stormy Daniels, NDLR) a servi Donald Trump auprès des électeurs républicains", observe encore Corentin Sellin sur Franceinfo, évoquant le "récit de complot" que s'est construit le milliardaire républicain. "Cette nouvelle inculpation, émanant de l'État fédéral, ne pourra qu'amener de l'eau au moulin de celui-ci", a encore ajouté le spécialiste de l'histoire américaine.

Selon une moyenne des sondages effectuée par le site web spécialisé RealClearPolitics, Donald Trump arrive à l'heure actuelle en tête dans les intentions de vote pour l'investiture républicaine face à Ron DeSantis, Nikki Haley et son ancien vice-président Mike Pence. Si l'élection avait lieu ce vendredi, il battrait aussi Joe Biden lors du scrutin présidentielle qui se déroulera le 5 novembre 2024.

Article original publié sur BFMTV.com