Fonds Marianne : les responsables associatifs pointent du doigt Marlène Schiappa et le préfet Gravel

La commission d’enquête du Sénat tente de faire la lumière sur l’utilisation du Fonds Marianne créé le 20 avril 2021 par Marlène Schiappa.

Mises en cause pour leur utilisation des subventions publiques, les deux principales associations bénéficiaires du fonds Marianne de lutte contre le séparatisme ont défendu ce mercredi 31 mai, devant une commission d’enquête du Sénat, leur bilan.

« Beaucoup de contre-vérités ont été dites dans la presse », a affirmé avec véhémence Cyril Karunagaran, président de l’USEPPM, l’une des deux associations avec Reconstruire le commun à passer sur le grill de la commission d’enquête du Sénat.

Celle-ci a été lancée pour tenter de faire la lumière sur l’utilisation du Fonds Marianne créé le 20 avril 2021 par Marlène Schiappa, alors ministre déléguée à la Citoyenneté, pour lutter contre le séparatisme après l’assassinat du professeur Samuel Paty.

Promouvoir les valeurs de la République

Initialement doté de 2,5 millions d’euros, il visait à financer des associations portant des discours de promotion des valeurs de la République pour apporter, notamment sur les réseaux sociaux, la contradiction à l’islam radical.

Mais fin mars et début avril, plusieurs médias ont mis en cause ces deux associations parmi les 17 lauréates, notamment sur la faiblesse des productions au vu des sommes publiques reçues (respectivement 355.000 euros et 330.000). Il a aussi été révélé que Reconstruire le commun avait dénigré plusieurs personnalités de gauche.

Selon Cyril Karunagaran de l’USEPPM, « la qualité de notre production a été plutôt bien accueillie par le CIPDR », le Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation, la structure du ministère de l’Intérieur qui gère administrativement ce fonds.

« Inexpérience » et des délais trop courts

Alors que des sénateurs lui demandent comment il a pu penser pouvoir passer, avant le Fonds Marianne, d’une structure avec un petit budget (50.000 euros annuels) et « cinq adhérents », à un projet à 355.000 euros, il plaide à plusieurs reprises son « inexpérience dans le champ des subventions publiques ».

Et reconnaît « une première erreur » : avoir « sollicité cette subvention sur ce sujet sensible ». Il explique comment, parti d’une « feuille blanche », il a dû « réduire la voilure » sur les ambitions du projet. Mais que malgré tout, « le bilan qualitatif a été atteint ».

Cyril Karunagaran confirme au passage que c’est bien le cabinet de Marlène Schiappa qui l’a contacté pour lui proposer de déposer un dossier de demande de subvention auprès du CIPDR au printemps 2021. Pour sa défense, il a également évoqué les faibles délais imposés par le cabinet de Marlène Schiappa « deux jours » pour constituer le dossier.

« On ne nous a jamais interdit de faire des contenus politiques »

Mohamed Sifaoui, le médiatique directeur des opérations de l’USEPPM, convoqué également mercredi, n’était « pas disponible », pour « des raisons de santé », selon la commission sénatoriale. Son audition sera reprogrammée ultérieurement. En avril il avait démenti toute « malversation » et dit n’avoir « rien à se reprocher ». Ahlam Menouni, présidente de Reconstruire le commun a également dénoncé une « campagne de désinformation médiatique ».

Les sénateurs ont pris le temps de regarder des extraits de vidéos produites par son association. Dans une émission - que Ahlam Menouni qualifie elle-même « d’infotainement » - on peut entendre par exemple une personne faire un jeu de mots dénigrant la maire de Paris Anne Hidalgo.

« On a du mal à voir le discours apaisé », tance le président PS de la commission des Finances, Claude Raynal. « Et le discours républicain ». Le CIPDR « ne nous a jamais interdit de faire des contenus politiques », assume Ahlam Menouni.

« Je ne regrette rien »

Pourtant, le 16 mai, Christian Gravel, secrétaire général du CIPDR, affirmait sous serment lui aussi devant cette commission que cette association avait produit « de nombreux contenus à caractère politique », notamment pendant la campagne électorale présidentielle, malgré plusieurs recadrages.

« Est-ce que nous avons parlé de politique en tant qu’affaire de la cité ? Oui et nous l’assumons parfaitement. (…) Est-ce que nous avons diffusé des posts partisans ? Absolument pas », assure Ahlam Menouni.

« On a été sélectionnés sur un projet, qui avait une ligne éditoriale qui avait pour objet de réagir à l’actualité et faire du divertissement politique généraliste », explique-t-elle. « Je ne regrette rien », a-t-elle assuré.

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