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Des Français "déboussolés" : ce que dit la presse européenne des manifestations contre la réforme des retraites

La manifestation contre la réforme des retraites, à Paris, le 31 janvier 2023 - Alain JOCARD © 2019 AFP
La manifestation contre la réforme des retraites, à Paris, le 31 janvier 2023 - Alain JOCARD © 2019 AFP

Après deux manifestations majeures qui ont réuni à chaque fois plus d'un million de Français, la presse britannique évoque une réforme qui touche "une partie centrale de l'identité nationale".

Mardi, entre 1,2 et 2,8 millions de Français ont bravé le pavé pour exprimer leur opposition à la réforme des retraites voulue par le gouvernement d'Emmanuel Macron, une participation en hausse par rapport à la première journée de grève du 19 janvier.

Alors que deux nouvelles journées de mobilisation ont déjà été annoncées - les 7 et 11 février - la presse européenne observe avec attention cette gronde sociale qui frappe l'Hexagone. Et qui pourrait même faire des émules, si l'on en croit la presse britannique.

Mimétisme britannique?

Le Royaume-Uni, pays qui était jusqu'alors peu habitué aux mouvements sociaux, est secoué depuis plusieurs mois par d'importantes grèves. Mercredi, des milliers d'enseignants sont descendus dans les rues de Londres, se joignants aux infirmiers et cheminots en colère. Les Anglais, qui aimaient jusqu'alors gentiment moquer leurs voisins français pour leur propension à manifester, appellent désormais à les imiter.

"Il est temps de défier le gouvernement britannique comme les Français le feraient", a ainsi titré le quotidien écossais The National.

"Ces Français, qui descendent dans la rue pour leurs retraites, ne le font pas uniquement pour ce problème, mais pour ce qu'ils estiment être une menace plus grande à la justice sociale. Cela fait partie d'une large bataille contre un système économique perçu comme injuste", écrit dans les colonnes du quotidien l'éditorialiste David Pratt.

Il appelle les Écossais à se mobiliser en nombre contre le gouvernement de Rishi Sunak à Londres.

Le magazine The Economist a même dédié un épisode de son podcast "The Intelligence" aux manifestations françaises. "L'âge de départ à la retraite touche une part centrale de l'identité nationale" française, y explique Sophie Pedder, la correspondante du titre de presse à Paris.

Une réforme "lunaire" en Italie

En Italie, où l'attention est actuellement portée sur un scandale relatif aux conditions de détention des détenus, les commentaires sont moins nombreux qu'Outre-Manche. La Repubblica s'est néanmoins étonnée de l'ampleur de la mobilisation, alors que l'âge de départ à la retraite est fixé à 67 ans chez nos voisins italiens. Le quotidien qualifie même de "lunaire" les propositions de certains candidats lors de la dernière élection présidentielle française, qui proposaient de ramener l'âge de départ à 60 ans.

Dans les colonnes du journal belge Le Soir, on parle elle d'une réforme "à peine présentée, déjà conspuée", quand en Espagne, El Pais met en garde Emmanuel Macron d'un "divorce durable avec une majorité de Français s'il maintient le projet de relever l'âge de la retraite de 62 à 64 ans".

Le journal espagnol dresse même un parallèle avec un autre mouvement social hexagonal: "Les manifestations ont été importantes dans les villes moyennes et petites, l'un des foyers des manifestations, comme elles l'ont été lors de la révolte des gilets jaunes en 2018".

Des Français "déboussolés"

Enfin, en Allemagne, le Frankfurter Allgemeine Zeitung note ces derniers jours la "nervosité" du gouvernement, avec la première ministre Élisabeth Borne ayant indiqué que l'âge de départ à 64 ans était "non négociable". "Même dans une France favorable à la grève, il est inhabituel que les administrations publiques se joignent à un débrayage en bloc", note également le quotidien, en lien avec la fermeture de plusieurs mairies ce mardi.

C'est cependant de Suisse que vient l'analyse la plus détaillée sur le mouvement qui secoue actuellement la France. Dans un "commentaire" publié sur le site du journal Blick, le journaliste basé en France Richard Werly estime que les manifestations sont "bien plus qu'une révolte pour les retraites".

L'article évoque des Français "déboussolés", dans un pays "en passe d'être surendetté". Avant de mettre en garde le gouvernement d'Emmanuel Macron: "Le laisser prospérer (le mouvement de mobilisation, ndlr), en misant sur son épuisement, est le meilleur moyen de se laisser, demain, submerger dans les urnes par une révolution".

Article original publié sur BFMTV.com

VIDÉO - "On peut faire fléchir le gouvernement" : à Paris, les manifestants contre la réforme des retraites croient à la réussite du mouvement