Ingérences étrangères: Julien Bayou accuse Marine Le Pen de "faux témoignage" sur un prêt russe

Une mauvaise nouvelle pour Marine Le Pen. Julien Bayou a annoncé auprès de BFMTV vouloir saisir le bureau de l'Assemblée nationale pour tenter de poursuivre Marine Le Pen en justice pour faux témoignage devant la commission d'enquête sur les ingérences étrangères.

"Le RN s'est tiré une balle dans le pied. Marine Le Pen a été relancée quatre fois sur le sujet du prêt russe et quatre fois, elle indique ne pas être au courant de choses qui sont pourtant sorties dans la presse", nous explique le député écologiste, membre de cette commission.

Pas de conséquence politique après ce prêt pour Le Pen

Auditionnée le 24 avril dernier par cet organe lancé à l'initiative de Jean-Philippe Tanguy, l'un des lieutenants de l'ex candidate à la présidentielle, Marine Le Pen avait dû s'expliquer sur d'éventuelles contreparties politiques en échange d'un prêt russe contracté en 2014.

"Si cela m'avait engagé à quoi que ce soit, je n'aurais pas signé", s'était alors justifiée la députée du Pas-de-Calais.

Sans guère convaincre. Dans les conclusions de cette commission, la députée Renaissance Constance Le Grip, qualifie le parti d"aligné" sur le "discours russe" au moment de "l'annexion illégale" de la Crimée en 2014, quelques mois après avoir négocié un prêt auprès d'une banque tchéco-russe.

Une créance qui change de propriétaire

Face aux refus de l’intégralité des banques françaises lors de la campagne des régionales en 2014, le mouvement avait à l'époque été contraint de passer par une banque privée russe afin de se faire prêter neuf millions d’euros.

Problème pour Marine Le Pen: ce prêt russe est ensuite passé de main en main. Accordée initialement par la banque russe FCRB, dirigé par un proche de Vladimir Poutine, qui a fait faillite deux ans plus tard, la créance sera d'abord récupérée par une société moscovite de location de voitures. Elle sera ensuite possédée par Aviazapchast, une société aéronautique dirigée par d’ex-militaires proches des services secrets de l’armée, et active en Syrie.

La dette a ensuite été réclamée par l'Agence d’assurance des dépôts bancaires russes comme l'avance Médiapart. Interrogée sur ce déroulé chaotique à plusieurs reprises lors de son audition, Marine Le Pen avait botté en touche.

"Je n'en savais absolument rien"

"Vous avez quand même conscience que cette banque (qui a accordé le prêt) était dirigée par un proche du pouvoir russe et que Monsieuer Schaffhauser (le négociateur du prêt pour le parti) lui-même nous a dit, lors de son audition, que jamais cette banque n’aurait fait ce prêt sans l’accord de Monsieur Poutine", lui a fait remarquer le député Modem Laurent Esquenet-Goxes.

"Je n’en savais absolument rien, mais rien!", a alors répondu l'élue.

Ensuite interpellée sur le rachat de sa créance, Marine Le Pen a assuré ne pas "être au courant de la société (de location de voitures) qui s'était intercalée en plein milieu" de la reprise de la dette.

"C'est quand même dur à croire. Moi en tout cas, je n'y crois pas", fait remarquer Julien Bayou auprès de BFMTV.com. "Axel Loustau, alors en charge des finances de la campagne de 2017, avait indiqué à l'AFP que le parti avait bien été informé de ce rachat", rappelle le parlementaire.

"Des accusations grotesques et infondées"

De quoi pousser le député écologiste à vouloir transmettre à la justice ce qu'il qualifie de "faux témoignage". Les faux témoignages devant une commission d’enquête sont passibles de sanctions pénales.

Julien Bayou compte donc adresser un courrier au bureau de l'Assemblée nationale, lui demandant de se pencher sur la situation et de transmettre un signalement, le cas échéant, au parquet. Du côté du RN, on nie en bloc.

"Ces accusations sont complètement grotesques et infondées. Julien Bayou n'a d'ailleurs servi à rien dans cette commission", avance le président de la commission d'enquête Jean-Philippe Tanguy.

La situation fait d'autant plus mauvais effet que cet organe avait été lancé en décembre dernier à l'initiative du groupe RN à l'Assemblée, avec l'objectif d'être justement à l'offensive, et de se défendre face aux accusations de collusion entre le parti et Moscou.

"Je doute que ces accusations prospèrent", ajoute encore le député proche de Marine Le Pen. Plus tôt dans l'après-midi, Marine Le Pen, qui n'était pas alors au courant des propos de Julien Bayou a dénoncé lors d'une conférence de presse un rapport "malhonnête" et "un procès politique".

Article original publié sur BFMTV.com