Intelligence artificielle : le enjeux de la future réglementation européenne

L'évolution rapide de l'intelligence artificielle (IA) a séduit par sa capacité à composer de la musique, à rédiger des essais et à imiter la voix humaine.

Mais l'IA a également suscité des craintes quant à sa capacité à produire de fausses nouvelles convaincantes et à manipuler l'opinion publique.

C'est pourquoi l'Union européenne s'empresse d'élaborer des règles pour réglementer l'intelligence artificielle dans le cadre d'un projet de loi ambitieux appelé "AI Act" (loi sur l'intelligence artificielle).

Jeudi 11 mai, les principales commissions du Parlement européen ont donné leur feu vert au projet de loi, ouvrant ainsi la voie à un premier vote à la mi-juin (le Conseil de l'UE devra ensuite se prononcer avant un vote final d'ici la fin de l'année).

En quoi consiste cette loi sur l'IA et quelles sont ses implications pour les citoyens européens et les géants de la technologie ?

Ce projet de loi classera les systèmes d'IA selon quatre niveaux de risque : de minime à inacceptable.

Un niveau inacceptable signifie que l'utilisation de l'IA est interdite. Par exemple, le système de crédit social en Chine où les gouvernements locaux classent les "bons" et les "mauvais" citoyens.

Parmi les autres utilisations inacceptables, citons l'identification biométrique en temps réel dans les espaces publics, où l'IA scanne votre visage et vous identifie automatiquement.

Les systèmes d'IA utilisés dans des catégories à haut risque telles que l'emploi et l'éducation, qui pourraient affecter le cours de la vie d'une personne, seront également soumis à des exigences strictes

Les infractions entraîneront des amendes pouvant aller jusqu'à 6 % du chiffre d'affaires annuel mondial de l'entreprise.

Selon Yohan Laux, les législateurs devront toutefois faire preuve de prudence lors de la rédaction de ce projet de loi, et ce pour de multiples raisons.

Johann Laux, expert en réglementation de l'IA : "D'une part, [les législateurs] doivent réglementer certains dommages et risques, et d'autre part, ils doivent veiller à ne pas étouffer l'innovation. D'autre part, la question de savoir comment définir correctement l'IA a été très controversée tout au long du processus d'élaboration de la loi sur l'IA. Encore une fois, si vous définissez l'IA de manière trop étroite, vous risquez de ne pas pouvoir réglementer certains dommages. Si vous la définissez de manière trop large, vous risquez d'être trop inclusif et d'étouffer l'innovation."

Étant donné que la technologie évolue rapidement, une autre question fréquemment soulevée est de savoir si la loi sur l'IA sera encore efficace dans quelques années.

Nous avons posé la question à Dragos Tudorache, un député européen roumain qui coparraine le projet de loi.

Dragoş Tudorache, député européen roumain et co-rapporteur de la loi sur l'IA : _"_Beaucoup de juristes travaillent avec des lois et des codes qui datent parfois de plusieurs centaines d'années. Le secret, c'est qu'en rédigeant une loi, il faut toujours essayer de saisir l'essence du type de relation ou de phénomène économique ou social que l'on réglemente, de telle sorte qu'il puisse résister à l'épreuve du temps dans cinq, dix, quinze et vingt ans. C'est ce que nous avons essayé de faire, c'est-à-dire qu'indépendamment de l'évolution de la technologie, ce système central de valeurs et d'obligations restera inchangé."

Une fois le projet adopté, il est probable qu'il n'entrera pas en vigueur immédiatement. Une période de grâce devrait être donnée aux acteurs du marché pour se mettre en conformité.