JEU DÉCISIF - Résilience !

Le tennis, sans mauvais jeu de mots, est souvent une affaire de rebond. Comme le montre trois des vainqueurs de la semaine.

(AP Photo/Claude Paris)
(AP Photo/Claude Paris)

Dans le sport de haut niveau, et plus encore avec une discipline individuelle comme le tennis professionnel, il faut chaque semaine remettre l’ouvrage sur le métier. Gagner un match ou deux. Parfois plus. Soulever un trophée, rarement. Et puis repartir. Ailleurs. Ne pas tomber dans le routine, ce piège. Retrouver, alors, des sources de motivation.

La résilience en est une. Je pensais à cela en regardant l’inattendue finale de l’ATP 500 de Rio entre Laslo Djere et Félix Auger-Aliassime. Le Serbe, 23 ans, a perdu ses parents, tous deux victimes d’un cancer, il y a sept ans pour sa maman et deux mois pour son papa. C’est avec ce fardeau qu’il joue au tennis. Mais c’est un fardeau devenu un carburant tant Djere, peut-être plus encore que s’ils n’étaient vivants, veut rendre hommage à ses parents en suivant les traces de ses brillants compatriotes et ainés, comme Janko Tipsarevic, Viktor Troïcki et évidemment Novak Djokovic. La résilience est d’ailleurs l’une des thématiques que le numéro un mondial aime mettre en avant. Les blessures, le chagrin ou le souvenir des êtres aimés peuvent donc parfois donner des ailes et le jeune Serbe a vécu la plus folle semaine de sa vie de joueur de tennis en remportant son premier titre au cours d’un tournoi où il avait battu d’entrée Dominic Thiem.

Résilience aussi, mais à un tout autre degré, pour Stefanos Tsitsipas, vainqueur à l’Open 13. Assommé par sa défaite en demi-finales de l’Open d’Australie face à Rafael Nadal, sans doute épuisé mentalement et physiquement par ses douze derniers mois où il avait tant joué et tant gagné, le Grec semblait plongé dans une sorte de « babyblues ». Rien de scandaleux ou honteux pour un joueur qui brûle les étapes. Un palier de décompression ne fait jamais de mal. Et puis comme le protégé de l’Academy Mouratoglou fait tout très vite, cette parenthèse n’a duré que deux semaines avant, donc, de briller de nouveau, au Palais des Sports de Marseille en remportant le trophée, son deuxième titre après Stockholm en fin d’année dernière. « Cette semaine, j’ai de nouveau senti cette rage de vaincre » a-t-il expliqué, rassuré et heureux de filer à Dubaï pour en découdre de nouveau dès cette semaine.

Vous en voulez encore ? Belinda Bencic, ça vous parle ? La Suissesse, déboulée toute jeune sur le circuit en nouveau petit prodige du jeu, sort de deux ans de galère avec un crochet par la case hôpital et une opération au poignet. Après un retour à l’automne 2017 via des petits tournois pour se reforger une confiance et un classement, elle tout emporté sur son passage à Dubaï (l’équivalent chez les dames d’un Masters 1000), battant quatre top 10, dont Simona Halep, la number one ou Aryna Zabalenka après avoir sauvé six balles de match. Remontée à la 23e place mondiale, Bencic est forcément aujourd’hui une autre joueuse, bien plus forte sur tous les plans que l’insouciante surdouée qu’elle fût. Et elle n’a que 21 ans…

Djere, Tsitisipas, Bencic, trois vainqueurs cette semaine, dont le point commun, à des niveaux bien différents évidemment -insistons là-dessus-, aura été de puiser dans les épreuves passées un carburant nouveau. Cette concomitance est un hasard, bien sûr, mais ce type de parcours, et ils sont nombreux sur le circuit, doit être un exemple pour tous les autres joueurs. Sur la capacité à s’investir, à travailler d’arrache-pied, à se faire mal, à montrer de la rigueur dans tous les domaines du quotidien, à accepter la souffrance à l’entrainement. Avant de retrouver la compétition et -peut-être- la victoire. Le tennis pro ou la résilience au quotidien finalement…