Jeux Olympiques Tokyo 2021 : l’histoire de Shek Wai Hung, star de la gymnastique, élevé par une "maman tigre"

Il fallait un athlète pour en comprendre un autre. Surnommée "maman tigre", Mme Shek, se souvient du périple qu’est l’éducation d’un athlète. Il lui a fallu être dure, traverser des moments bouleversants, avec des hauts et des bas, aux côtés de son fils adoré, le gymnaste Shek Wai Hung.

"J’étais dans l’obscurité totale avant que ma mère m’emmène au camp d’entraînement de Guangzhou. Cette décision m’a aidé à devenir un athlète olympique à 21 ans, 15 ans plus tard." Entraîner un athlète, qui plus est olympique, n’est jamais une tâche facile. Derrière la gloire du gymnaste Shek Wai Hung, surnommé "Stone" ("le roc", en anglais), et ses médailles d’or consécutives aux Jeux asiatiques, on découvre du sang, de la sueur, des larmes, d’innombrables heures d’entraînement, et bien sûr, la plus inconditionnelle supportrice de l'athlète, Mme Shek, véritable "maman tigre".

Comme pour bon nombre de sportifs, le chemin vers l’excellence de Shek a été semé d’embûches. Sa première apparition aux Jeux de Londres en 2012 était insatisfaisante, c’est le moins qu’on puisse dire. Le gymnaste originaire de Hong Kong avait alors perdu lors de la phase des qualifications. Mais cette déception fut ensuite balayée par de l’or en saut de cheval aux Jeux asiatiques. Il fut le premier gymnaste de Hong Kong à remporter une médaille d’or lors de la compétition multisports, un peu plus de deux ans plus tard, à Incheon, en Corée du Sud.

Une malencontreuse blessure a ensuite privé "Shek le roc" de sa deuxième participation aux JO à Rio de Janeiro, en 2016, mais il a vite rebondi lors des Jeux asiatiques suivants qui se déroulaient à Jakarta, à l'été 2018. Sa deuxième médaille d’or aux Jeux asiatiques semblait avoir enfin conjuré le sort, alors que Shek continuait de briller dans diverses compétitions. Par la suite, il a remporté l’or deux fois d’affilée en une semaine lors de la World Challenge Cup en 2019, avant de gagner son billet pour les Jeux Olympiques de Tokyo, l’année d’après.

"Elle peut être dure et impitoyable, mais en réalité, son cœur saigne à l’intérieur, je le sais"

En y repensant, Shek était voué à devenir gymnaste. Mme Shek se souvient de son fils déjà très actif à 5 ans : "Il n’était pas méchant, mais il sautait partout et il adorait faire le poirier, même au centre commercial", confie-t-elle dans un entretien exclusif avec Yahoo News HK. Voir ces gymnastes s’envoler à la télévision était tout ce qu’il fallait pour planter la graine dans l’esprit de Shek. Fasciné par ces mouvements agiles, Shek Wai Hung disait à sa mère qu’il voulait faire de la gymnastique. Il fit alors le premier pas vers un tout nouveau monde.

Mme Shek, athlète à la retraite, a permis d’ouvrir la voie pour la carrière de Wai-hung. Un été, elle l’emmena au centre d’entraînement de Guagzhou, en Chine. "Les entraînements étaient difficiles, j’avais peur qu’il refuse d’y aller. Je lui ai donc fait croire qu’on allait faire des courses, admet-elle. En le laissant au gymnase, je lui ai même dit que je viendrai le chercher après."

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Ce soir-là, Shek a réalisé qu’il avait été abandonné. Le jeune homme de six ans a appelé chez lui depuis une cabine téléphonique, en pleurs, demandant si sa mère l’avait effectivement laissé. Mme Shek se souvient avoir retenu ses larmes, expliquant à Shek qu’il devait travailler dur aux entraînements. "On peut dire que c’est une maman tigre. Elle peut être dure et impitoyable. Et elle a toujours cet air strict, dit Shek. Mais en réalité, son cœur saigne à l’intérieur, je le sais." La mère et le fils se sont retrouvés un mois plus tard, et le souvenir de son subterfuge ne laisse aucun arrière-goût dans la bouche de Shek, bien au contraire. Cela l’a aidé à grandir et à s’émanciper.

Apothéose en vue à Tokyo ?

Puis viennent l’accident et ses cicatrices, en 2006. Lors d’une compétition nationale à Kunming, en Chine, l’atterrissage manqué de Shek provoque une blessure de la sixième et septième vertèbre qui le cloua au lit pendant trois semaines avant un retour à Hong Kong pour une opération. Horrifiée et inquiète, toute la famille s’oppose à ce que Shek, poursuive sa carrière de gymnaste après son rétablissement. Wai Hung, le plus jeune de sa fratrie, les supplie de le laisser continuer. On imagine aisément la peine intérieure de sa mère aimante et protectrice. En se souvenant de cet incident il y a 15 ans, Mme Shek ne peut plus se contenir : "Je me souviens l'avoir supplié d'abandonner."

La persévérance finit toujours par payer, et "Shek le roc" l’emporte sur sa mère, qui l’avait soutenu dès le début et l’accompagnait au gymnase tous les jours lors de son retour au gymnase après son rétablissement. Voir son fils regagner sa force après un entraînement incessant a aidé Mme Shek à dissiper ses doutes. La cicatrice dans la nuque de son fils est un rappel de cette tristesse, de ces larmes et de cette souffrance. Shek reprit du service après s’être remis de sa blessure, et commença à briller aux compétitions internationales.

Il valida ainsi son billet pour les Jeux de Londres en 2012, mais ces derniers furent une grande déception pour le débutant de 21 ans. Il ne dépassa pas la phase des qualifications, et finit en pleurs, s’excusant auprès de sa mère. Celle-ci ne pouvait que le réconforter que de loin, le regardant depuis les gradins. "En tant que mère, sa santé et sa sécurité sont mes priorités, il y aura toujours d’autres Jeux Olympiques." Le pouvoir de l’amour.

Mais les prochains JO arriveront finalement huit ans plus tard, après une nouvelle déception rencontrée par Shek, recalé aux qualifications pour les Jeux de Rio, en 2016, à cause d’une blessure. En route pour Tokyo, dans quelques jours, cette fois semble être la bonne et une conclusion sur le podium est à portée de main. Mais pour Mme Shek, qui devra suivre la compétition depuis son poste de télévision en raison des mesures sanitaires liées au Covid-19, la seule chose qui importe, c’est que son cher fils puisse sauter comme il faut et atterrisse en toute sécurité.

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