Sur l’immigration, Delga cite Mbappé et Noah, et fait fausse route

La présidente de la région Occitanie, qui a évoqué Kylian Mbappé, Yannick Noah ou Omar Sy pour justifier sa position dans les débats sur l’immigration, a ensuite expliqué s’être « mal exprimée ».

POLITIQUE - Quarante-deux secondes. C’est le temps qu’il a fallu à Carole Delga ce mercredi 7 juin pour partir du projet de loi immigration du gouvernement et arriver à Kylian Mbappé, dans un raccourci pour le moins surprenant, et déjà remarqué du côté du Rassemblement national. Rapide pour un but contre son camp.

La présidente socialiste de la région Occitanie était invitée de la matinale de franceinfo pour commenter l’actualité, évoquer le grand raout des anti-Nupes qui vient de se tenir à Montpellier, et disserter, donc, sur l’immigration.

Les « personnalités préférées des Français »

Interrogée sur l’intention de l’exécutif de juguler les flux migratoires, Carole Delga a expliqué qu’il fallait au contraire « arrêter de véhiculer cette image d’une immigration qui ne représente qu’une menace ». Et pour elle, le meilleur exemple de tout cela est à trouver du côté de Kylian Mbappé ou de Yannick Noah, comme vous pouvez le voir ci-dessous à partir de 5’40 :

« L’immigration, c’est une richesse pour la France. Qui a fait fonctionner les hôpitaux, les maisons de retraite pendant le Covid ? Beaucoup d’immigrés », a-t-elle ainsi lancé, pour se démarquer du futur projet du gouvernement, avant d’ajouter : « Qui sont les personnalités préférées des Français ? C’est Kylian Mbappé, c’est Yannick Noah, c’est Omar Sy. »

De quoi provoquer la moue dubitative de la journaliste Salhia Brakhlia en plateau, ainsi que les vives critiques de plusieurs élus sur les réseaux sociaux… Et un rétropédalage en règle de l’intéressée, quelques heures plus tard.

« Wow la séquence… »

Comme le lui ont rappelé les journalistes présents à ses côtés, il est effectivement curieux, à tout le moins, de prendre les trois idoles comme exemples sur ce sujet. Tous sont nés en France : Kylian Mbappé en 1998 dans le XIXe arrondissement de Paris ; Yannick Noah, dont on célèbre cette année le 40e anniversaire de sa victoire à Roland Garros, à Sedan dans les Ardennes en 1960 ; et Omar Sy à Trappes, dans les Yvelines en 1978.

« Ils sont d’origine d’autres pays », a poursuivi Carole Delga, manifestement embarrassée par les remarques, « ce sont les fruits de l’immigration. » Notons que la mère du joueur parisien, comme celle du champion de tennis devenu chanteur, sont toutes deux nées en France. À Bondy pour l’une, à Sedan, pour l’autre. Le père de Kylian Mbappé est né à Douala, au Cameroun. Celui de Yannick Noah à Yaoundé, au Cameroun également.

Avec cette sortie, Carole Delga a repris - à ses dépens - un réflexe déjà vu du côté du Rassemblement national, prompt à louer certaines de ces personnalités - françaises - comme des modèles « d’assimilation. »

Et sur les réseaux sociaux, plusieurs responsables politiques s’en sont rapidement émus. « Carole Delga affiche ses préjugés sur la nationalité de Français d’après leur couleur de peau. Consternante contamination par les clichés de l’extrême droite », a par exemple répliqué le leader de la France insoumise Jean-Luc Mélenchon, en accusant la socialiste de « défaire la France. » « Wow la séquence… », ajoute, laconique, la députée écologiste Sandrine Rousseau.

Carole Delga dit ses « regrets »

Nombreux sont les élus de la Nupes a réagir, de Carlos Martens Bilongo à Sébastien Rome en passant par Benjamin Lucas ou Nadège Abomangoli. « Au bout de combien de générations madame Delga nous autorise-t-elle, nous qui sommes noirs, à être considérés comme Français ? », interroge par exemple la députée insoumise de Seine-Saint-Denis sur Twitter, qui « se passera des biais racistes de ceux qui disent “ j’ai un ami noir ” ou “ j’aime Noah”. »

Dans ce contexte et face au tollé grandissant, Carole Delga a repris la parole en fin de matinée. « Je m’appelle Delga. Première, deuxième, 100e génération, nous sommes tous des enfants d’immigrés », a-t-elle tenté de se rattraper, en expliquant « regretter » s’être « mal exprimée. » « Face à ceux qui brandissent l’immigration comme une menace, j’ai rappelé que c’est une richesse, une contribution au génie et aux succès de notre pays », écrit la présidente du Conseil régional d’Occitanie sur les réseaux sociaux. Sans doute, mieux aurait-il valu éviter les passements de jambe hasardeux.

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