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L’IVG dans la Constitution ? « C’est au gouvernement de prendre le relais »

L’IVG dans la Constitution ? « C’est au gouvernement de prendre le relai » (photo de Mélanie Vogel prise le 21 octobre 2021)
ALAIN JOCARD / AFP L’IVG dans la Constitution ? « C’est au gouvernement de prendre le relai » (photo de Mélanie Vogel prise le 21 octobre 2021)

POLITIQUE - La parole est à la Première ministre. Depuis que le Sénat a validé l’inscription de l’accès à l’IVG dans la Constitution, mercredi 1er février dans la soirée, les associations féministes et les responsables politiques de gauche poussent le gouvernement à sortir du bois.

Et pour cause. Nombreuses sont celles et ceux à estimer que seul un projet de loi porté par Élisabeth Borne où l’un de ses ministres permettra d’aller au bout de ce combat entamé à l’automne dernier, après la décision historique de la Cour suprême des États-Unis de révoquer le droit à l’avortement. Si la proposition suit son parcours législatif classique, elle devra, à présent, être adoptée par l’Assemblée dans les mêmes termes, puis être soumise à référendum. Une gageure, à en croire Mélanie Vogel, la sénatrice EELV à l’origine de la première mouture du texte.

La parlementaire raconte au HuffPost cette soirée sénatoriale historique. Mais inachevée. Si elle évoque des réserves sur une version moins ambitieuse que prévu, l’élue des Français de l’étranger exhorte, avant tout, l’exécutif à sortir de « l’hypocrisie » et à prendre ses responsabilités.

Que ressentez-vous après le vote du Sénat sur l’IVG ?

Évidemment j’ai ressenti une grande émotion. J’ai du mal à la décrire… C’est cette émotion qui nous rattrape quand on vit un moment que l’on sait historique. C’était le cas hier. Bien sûr, le combat n’est pas fini, mais le verrou qui existait au Sénat est levé. On sait désormais qu’il y a une majorité dans les deux chambres pour inscrire l’IVG dans la Constitution. Nous n’avons jamais été aussi prêts du but.

Quelle doit être la suite, désormais ?

Maintenant que la question de savoir si le Parlement veut, ou non, inscrire le droit à l’IVG dans la Constitution, est tranchée, le gouvernement doit prendre le relais et rédiger un projet de loi. C’est la solution la plus efficace pour plusieurs raisons : cela permet de ne pas avoir à ratifier la modification par référendum. Et cela donne un cadre d’examen du texte qui ne soit pas dégradé, comme dans les niches parlementaires où le temps de discussion est très restreint.

Pourquoi pas un référendum ?

Personne ne peut raisonnablement souhaiter un référendum sur cette question. Les Français sont extrêmement favorables à l’idée d’inscrire l’IVG dans la Constitution (74% selon un sondage YouGov publié en décembre par Le HuffPost, NDLR). Quel serait l’intérêt de leur demander s’ils veulent protéger un droit qu’ils ont acquis ? L’issue serait évidente. En plus, cela donnerait une tribune démesurée aux anti-IVG, au vu de l’état de l’opinion publique, tranchée, sur ce débat. Sans oublier que ça coûte des dizaines de milliers d’euros à organiser. Il serait mal venu, dans la période, que le gouvernement nous explique vouloir un référendum sur une question dont on connaît déjà la réponse.

Croyez-vous en l’engagement du gouvernement sur cette question ?

J’ai du mal à comprendre la position du gouvernement. Je ne sais pas pourquoi il ne dépose pas ce texte alors que les ministres soutiennent officiellement l’ambition d’inscrire le droit à l’IVG dans la Constitution. Or, s’ils veulent réellement le faire, ils savent très bien que la seule manière que ça fonctionne, c’est un projet de loi. Persister à ne pas le déposer, ça n’a pas de sens, ça n’a pas de cohérence. C’est même une forme d’hypocrisie.

L’Assemblée et le Sénat sont donc d’accord pour inscrire l’IVG dans la Constitution… Mais pas avec la même formule. Quelle écriture souhaitez-vous retenir ?

Les différences sont fondamentales. La formulation de l’Assemblée, meilleure que celle du Sénat, impose des garanties substantielles puisqu’elle parle de ’droit à l’avortement’, une notion qui implique que l’État a un devoir de rendre l’exercice de ce droit possible. La notion de liberté, retenue par la Haute assemblée, elle, reste inhérente à chaque individu. En résumé, dans la rédaction de Philippe Bas (sénateur LR), on se contente d’entériner la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui dit, au fond que législateur est bien compétent sur la question, mais on ne donne pas de garantie sur son exécution.

Or l’intérêt juridique réel de notre proposition, c’est bien de donner une base constitutionnelle pour pouvoir censurer une loi qui viendrait attaquer le droit à l’avortement. Prenons l’exemple d’un texte qui viendrait, demain, réduire le délai pour avoir recours à l’IVG de 14 à 8 semaines ou imposer de nouvelles conditions pour son accès. Ce serait possible avec la rédaction de monsieur Bas. Avec la nôtre, ça ne l’est pas.

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