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Sous l'impulsion de Berlin, la Commission présente un nouveau pacte migratoire européen

SOUS L'IMPULSION DE BERLIN, LA COMMISSION PRÉSENTE UN NOUVEAU PACTE MIGRATOIRE EUROPÉEN

par Gabriela Baczynska

BRUXELLES (Reuters) - La Commission européenne présente ce mercredi sa réforme de la politique migratoire proposant d'introduire parmi les Vingt-Sept un "mécanisme de solidarité obligatoire" cinq ans après la crise des réfugiés de 2015 qui a vu les Européens se déchirer et se désunir.

Ce nouveau pacte propose un partage de l'accueil des centaines, parfois milliers de personnes arrivant chaque semaine sur les côtes européennes.

La chancelière Angela Merkel, qui avait ouvert les frontières de l'Allemagne à un million de personnes il y a cinq ans, a joué un rôle moteur dans l'élaboration de ce plan qu'elle considère, à l'approche de la fin de sa carrière politique, comme une pièce maîtresse de l'héritage qu'elle laissera derrière elle.

"C'est une proposition forte en soutien à l'appel lancé par Angela Merkel en faveur d'une solidarité européenne", note un responsable européen. "Mais ça ne passera pas facilement", ajoute-t-il.

Dans son discours annuel sur l'état de l'Union européenne, le 16 septembre dernier, la présidente allemande de la Commission, Ursula von der Leyen, a estimé que la politique migratoire devait se baser sur la reconnaissance que "chaque être humain dispose d'une dignité solennelle".

"Les migrations ont toujours été un fait en Europe, et le seront toujours. C'est la normalité. Nous devrions être capables, et nous devons être capables de les gérer", a-t-elle ajouté.

Des pays comme la Pologne, la Hongrie, l'Autriche, la Slovénie ou bien encore la République tchèque qui s'étaient opposés en 2015 à la politique de quotas de prises en charge de migrants proposée par la Commission Juncker restent cependant hostiles à l'accueil sur leur territoire de réfugiés qui continuent d'arriver du Moyen-Orient, d'Afrique ou d'Asie.

"Nous ne pouvons pas accepter le paradigme selon lequel la solidarité serait basée sur des mesures obligatoires", relevait lundi sur le site Euractiv l'ambassadeur de Pologne auprès de l'UE, Andrzej Sados.

NORMALISER LE DÉBAT

La gestion de la crise du camp de Moria, sur l'île grecque de Lesbos, ravagé par les flammes, a récemment illustré la profondeur des divisions entre Européens. L'Allemagne s'est décidée à accueillir 1.500 des 12.000 réfugiés chassées par l'incendie, neuf autres Etats se sont engagés à accueillir 400 enfants.

La proposition que doit dévoiler la Commission européenne obligerait chaque Etat membre à accueillir un certain nombre de réfugiés en échange d'une dotation européenne de 10.000 euros par adulte, selon des responsables et diplomates informés de la teneur du plan.

Les pays qui se déroberaient à leurs engagements s'exposeraient à des procédures d'infraction susceptibles de déboucher sur de lourdes amendes.

Le nouveau pacte migratoire européen viserait aussi à accentuer les reconduites dans les pays d'origine (avec la possibilité d'une restriction des visas pour les citoyens de pays refusant de reprendre leurs ressortissants partis clandestinement vers l'UE) et à aider les Etats étrangers à gérer les flux migratoires avant que les candidats à l'exil n'atteignent l'Europe.

"Nous devons normaliser le débat sur les migrations", souligne un autre responsable européen.

"Quelle que soit la difficulté des mesures qui doivent être prises, il est plus facile de les prendre maintenant, alors que la situation aux frontières n'est pas en crise", ajoute-t-il en comparant l'instant présent à la crise de 2015.

D'après les données de l'Onu, quelque 124.000 personnes ont réussi l'an dernier à traverser la Méditerranée, un nombre en recul constant depuis 2015. Quelque 1.319 migrants ont péri en mer en 2019.

(avec Thomas Escritt à Berlin; version française Henri-Pierre André, édité par Blandine Hénault)