Mort de Pierre Audin, le fils du militant anti-colonial Maurice Audin

Pierre Audin a consacré sa vie à faire la lumière sur les circonstances de la disparition de son père, Maurice Audin fut « enlevé le 11 juin 1957 à Alger, puis torturé et tué par les militaires français ».

DECES - Le fils de Maurice Audin, militant anti-colonial assassiné par l’armée française en Algérie en 1957, est mort dimanche 28 mai, a annoncé une association créée à la mémoire de son père et de sa mère.

« Pierre Audin nous a quittés » dimanche « des suites d’un cancer », a indiqué la Fondation Josette et Maurice Audin dans un communiqué.

Sa vie aura été consacrée au « combat incessant, aux côtés de sa mère Josette, pour que soit dite toute la vérité sur les circonstances de la disparition de son père, Maurice Audin », qui « engagé sans réserve pour l’indépendance de l’Algérie », fut « enlevé le 11 juin 1957 à Alger, puis torturé et tué par les militaires français », selon ce texte.

Des « exactions commises au nom du “maintien de l’ordre” et de la “pacification” »

« Ce combat, qui concernait aussi les milliers d’autres Algériennes et Algériens qui ont subi le même sort, est devenu emblématique de la lutte contre la torture et les exactions commises au nom du “maintien de l’ordre” et de la “pacification” » par la France durant la guerre d’Algérie (1954-1962), a poursuivi la fondation.

En septembre 2018, un an après son élection, Emmanuel Macron avait demandé « pardon » à la veuve de Maurice Audin.

Dans une déclaration écrite qu’il avait remise à Josette Audin, depuis lors décédée, le président avait reconnu, « au nom de la République française, que Maurice Audin a été torturé puis exécuté, ou torturé à mort (...) » et que « si sa mort est, en dernier ressort, le fait de quelques-uns, elle a néanmoins été rendue possible par un système légalement institué : le système “arrestation-détention”, mis en place à la faveur des pouvoirs spéciaux qui avaient été confiés par voie légale aux forces armées à cette période ».

La vérité dévoilée en 2013

Le 11 juin 1957, en pleine bataille d’Alger, Maurice Audin, un assistant de mathématiques à la faculté d’Alger et membre du Parti communiste algérien, suspecté d’aider le FLN, était arrêté, probablement par des parachutistes du général Jacques Massu. Sa trace se perd dix jours plus tard.

L’explication officielle donnée à sa disparition - « évasion au cours d’un transfert »-, n’a jamais convaincu ses proches, qui devront attendre jusqu’en 2013 l’ouverture des archives de l’affaire.

Pierre Audin, mathématicien, comme son père, avait obtenu « il y a un peu plus d’un an (un) passeport algérien », selon la Fondation. « Il a activement participé à la création du Prix de mathématiques Maurice Audin et à son maintien, contre vents et marées, au fil des années », un prix véhicule de « coopération franco-algérienne », de même source.

Le mathématicien et ancien député Cédric Villani a rendu hommage à son « ami fidèle » sur Twitter.

« Frère en vulgarisation math, ami fidèle en toutes circonstances, jusqu’à la mort il a levé le poing pour la liberté. Avec lui, certains des moments les plus émouvants de ma vie », a-t-il écrit.

VIDÉO-Maurice Audin, torturé selon un "système institué en Algérie par la France"