Nabil, ce fakir

Auteur d’une prestation de haut vol dimanche soir face au PSG, le maître à jouer des Gones a retrouvé cette saison la plénitude de ses moyens. Focus sur un joueur qui, à défaut de piétiner des braises, marche littéralement sur l’eau.

Les grands joueurs répondent toujours présents lors des grands rendez-vous selon la formule consacrée. Un adage que Nabil Fekir a su faire sien très vite dimanche soir au Parc OL. Deux minutes ont en effet suffi à l’attaquant lyonnais pour faire sauter le verrou parisien d’un astucieux coup franc, renvoyant Alphonse Areola à ses études sur le placement sur coup de pied arrêté excentré. La suite fut à l’avenant : impeccable dans l’utilisation du ballon, exemplaire dans son attitude – notamment dans le travail défensif -, le capitaine de l’OL s’est montré à la hauteur de son talent et de son statut de leader.

Un retour au plus haut niveau qu’escortent des statistiques hyperboliques. Avec 19 buts et 5 passes décisives toutes compétitions confondues cette saison, Fekir affiche les meilleurs temps de passage de sa carrière depuis ses débuts professionnels en 2013. Si ses chiffres suffisent à illustrer son impact à l’approche du but adverse, ils ne doivent en revanche pas en occulter d’autres, tout aussi éclairants sur son influence. Le capitaine de l’OL présente ainsi une moyenne de 82,8% de passes réussies par match – un pourcentage particulièrement élevé au regard de son poste -, et facture 3,8 dribbles réussis par rencontre – ce qui en fait le 5è meilleur joueur d’Europe dans cet exercice. Des données révélatrices, auxquelles il convient d’ajouter le nombre de fautes qu’il subit (64 depuis le début de la saison, un record), et celles qu’il commet lui-même (2,5 par match).

Couteau suisse

Flatteuses, ces statistiques esquissent le portrait d’un joueur au profil singulier. Celui d’un homme à tout (bien) faire, aussi à l’aise dans la conservation du ballon que dans sa transmission, capable de rayonner et de faire briller, et ne rechignant pas à enfiler le bleu de chauffe lorsque les circonstances l’exigent. L’entraîneur des Gones, Bruno Genesio, ne se fait d’ailleurs pas prier pour tirer profit du talent protéiforme du couteau suisse maison. Meneur de jeu, milieu excentré, neuf et demi, et même relayeur mercredi dernier face à Guingamp aux côtés de Ndombélé et Tousart : Fekir navigue de poste en poste avec un égal bonheur depuis le début de la saison.

Conscient de l’atout que représente sa polyvalence, l’intéressé n’a pas hésité à la faire valoir dimanche au micro de Téléfoot, quand l’inévitable question sur son avenir tricolore lui a été posée. “Je peux jouer partout, à tous les postes. Je peux jouer à droite, devant, en soutien de l’attaquant. Je suis à la disposition du coach.“, a-t-il indiqué, avec un brin d’esprit de calcul. Lucide, Fekir connaît le prix des places en équipe de France. Alors autant mettre toutes les chances de son côté…

Reste que le simple fait qu’il puisse de nouveau rêver en bleu constitue en soi un motif de satisfaction. Une gageure même, au regard de l’inclinaison de la pente qu’il a dû remonter. Victime d’une rupture du ligament croisé du genou droit avec les Bleus en septembre 2015 contre le Portugal, le capitaine lyonnais est en effet resté longtemps loin des terrains. Et de son meilleur niveau. Atone en 2016, discret la saison dernière, il semblait avoir perdu cette explosivité, ce petit dixième de seconde d’avance que sa vision du jeu et sa créativité occupaient avec tant de réussite avant sa blessure. Désormais revenu au sommet de sa forme, le maître à jouer de l’OL sait qu’il ne lui manque pas grand-chose pour tutoyer de nouveau les cimes. Il sait aussi qu’il n’y a pas de temps à perdre s’il veut préserver ses chances de s’envoler avec les Bleus cet été. Ça tombe bien, ce n’est pas dans ses habitudes.