Nantes: chez les Canaris, l'angoisse à tous les étages

Nantes: chez les Canaris, l'angoisse à tous les étages

"L’ambiance est morose". Pour ce salarié qui a connu les deux relégations de 2007 et 2009, croiser le regard de ses collègues à la Jonelière ramène à de sombres souvenirs. "Lundi matin, ce n’était pas gai évidemment. Les joueurs sont tellement apathiques sur le terrain. Mais tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir: nous sommes des soldats, on bosse". Certes, le FC Nantes est toujours en vie à un point de l'AJ Auxerre. Mais il n’est plus maître de son destin.

Dans les bureaux, chacun fait ses calculs en comparant le parcours d’Auxerre - qui ira à Toulouse et recevra Lens - avec celui de Nantes qui voyagera à Lille avant d’affronter Angers à domicile. "On est obligé de travailler sur un plan B en Ligue 2, confie cet autre salarié. En interne, c’est dur. Se dire que l’année prochaine il faudra peut-être aller à Rodez ou Pau après avoir vécu le retour de la coupe d’Europe et deux finales de Coupe de France en un an... Quel gâchis!"

Certains s’inquiètent aussi pour les emplois. Car lors des précédentes relégations, il y a quinze ans, le club comptait moins de salariés. En 2007, pourtant, 23 salariés avaient été visés par des licenciements avant que six finalement négocient leurs départs. "Nous ne sommes pas dans le cas de Bordeaux l’an passé, qui avait beaucoup de salariés. Nous, on manque de bras", se convainc l’un des derniers arrivés sur les bords de l’Erdre.

Depuis le naufrage de la finale en Coupe de France, certains s’agacent aussi du comportement des joueurs: "On a travaillé tellement et sur le terrain ils ne nous le rendent pas", peut-on lire sur certains échanges de messages en interne.

100 jours sans victoire en Ligue 1

Dans le bâtiment des pros qui fait face à l’administratif à la Jonelière, l’ambiance n’est pas plus joyeuse. La défaite 3-0 à domicile samedi contre Montpellier a laissé des traces. Les joueurs nantais sont à la dérive en Ligue 1, ils n’ont pas marqué depuis 30 jours et n’ont plus connus le goût de la victoire depuis le 12 février. "Cent jours sans". Pierre Aristouy avait dit dès son arrivée qu’il devait voir quels étaient les joueurs prêts à partir à la guerre. Pas sûr qu’il y en ait 11. Car désormais, certains jouent avec la peur au ventre et il faut éviter la contagion. Quitte à faire appel aux jeunes comme Stredair Appuah, auteur d’une bonne entrée en jeu samedi. "Il ne faut pas mettre tous les joueurs dans la même case, avait analysé l'entraîneur après le match. Les joueurs sont abattus et c'est normal. D'autres ont peur. Il ne faut pas qu'ils jouent le week-end prochain".

Pour certains, un grand ménage se prépare si le FC Nantes prend le chemin de la Ligue 2. Alban Lafont et Ludovic Blas vont partir mais à des prix moins élevés qu’il y a un an. Andy Delort retournera à Montpellier et Mostafa Mohamed à Galatasaray. Mais quid des autres encore sous contrat, mais qui n’ont pas forcément envie de jouer à l’étage du dessous? Simon (2024), Sissoko (2024), Pallois (2024), Girotto (2024), Mollet (2025), Casteletto (2026) ou Merlin (2026) auront-ils des bons de sorties? Pas certain. Du côté de la direction, de belles économies de salaires seraient faites avec des clauses de baisses de salaires à 10.000 ou 15.000 euros en cas de descente.

En Ligue 2, l’entraîneur ne devrait pas être Pierre Aristouy, qui a prolongé son contrat de deux ans mais ne possède pas le brevet d'entraîneur professionnel de football (BEPF, diplôme nécessaire en Ligue 1 sans lequel le club doit payer 25.000 euros d’amende par match). La tentative de glisser le coach dans la promo 2024 n’est pas possible. Cette année, ils sont dix à suivre la formation et Aristouy ne peut rejoindre les Digard, Abriel ou Bergougnoux. Mais du côté de la direction on ne veut pas se poser pour le moment la question du coach.

Les féminines et la réserve également vers la descente

L'adjoint Oswaldo Vizcarrondo avait réussi à sortir de la zone rouge pour son dernier match à la tête de l’équipe féminine il y a quinze jours. Les filles qui évoluent en D2 y sont retournées le week-end dernier, à un match de la fin du championnat. Elles n’ont plus leur destin en main. La réserve menée par Stéphane Ziani en National 2 pourrait également descendre à l’étage inférieur le week-end prochain.

Pas de quoi avoir le sourire pour les supporters, qui pourraient vivre trois descentes dans les prochains jours. Depuis le début de la saison plus de 30.000 spectateurs se retrouvent pourtant en moyenne à chaque journée de Ligue 1. Il faut remonter à la saison 2006-2007 pour retrouver une telle affluence à La Beaujoire. Une saison qui avait vu les Canaris descendre pour la première fois de leur histoire à l’échelon inférieur. Nul doute que 16 ans plus tard une relégation aurait les mêmes effets. Pour leur première saison en Ligue 2, les Nantais n’étaient plus que 22.000 à soutenir leurs couleurs et 11.000 en 2010-2011, alors que les Jaune et Vert végétaient à l’étage inférieur.

Les supporters entre résignation et colère

Pour le dernier match face à Angers, si le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) ne répond pas favorablement à la demande du FC Nantes de suspendre la décision de fermeture de la tribune Loire, ils ne seront qu’un peu plus de 25.000 pour assister à un enterrement de première classe... ou un bonheur indescriptible en cas de maintien dans une saison riche en émotions.

Quel que soit le scénario, nul doute que la saison laissera un goût d’inachevé et d’amertume. Samedi dernier, beaucoup ont loué l’attitude des supporters qui ont soutenu les joueurs pourtant menés 2-0. À 3-0, toutefois, nombreux ont quitté La Beaujoire pendant que la brigade Loire entonnait: "Aux joueurs de merde, à cause de vous on se tape la honte dans toute la France". La suite s’est déroulée sans heurts. À la Jonelière, jour et nuit, un dispositif de sécurité est malgré tout en place pour toute la semaine. L’angoisse à tous les étages...

Article original publié sur RMC Sport