Pourquoi Les Échos ne sont pas sortis ce vendredi matin

Photo d’illustration d’un kiosque à journaux parisien, le 21 mars 2020
Photo d’illustration d’un kiosque à journaux parisien, le 21 mars 2020

Inquiets pour leur indépendance vis-à-vis de leur actionnaire LVMH, les journalistes de la rédaction ont entamé un mouvement de grève.

MÉDIAS - La quasi-totalité des journalistes des Échos, inquiets pour leur indépendance vis-à-vis de leur actionnaire LVMH, ont entamé jeudi un mouvement de grève de 24 heures qui a donc empêché la parution du quotidien ce vendredi 2 juin en versions papier et numérique, a annoncé sa Société des journalistes (SDJ).

À l’issue d’une assemblée générale suivie d’un vote, la SDJ a recensé 218 voix pour la grève, 3 contre et un blanc. Le dernier mouvement de grève de la rédaction de ce journal d’information économique et financière remonte à 2007 après l’annonce du rachat du journal par LVMH.

En mars, la SDJ des Échos avait déjà protesté contre le départ surprise du directeur de la rédaction, Nicolas Barré, y voyant une « éviction brutale par l’actionnaire », le milliardaire Bernard Arnault, à la suite d’« articles qui auraient déplu ».

Jeudi 1er juin, elle accuse la direction du groupe Les Échos de « vider de sa substance le droit de veto des journalistes sur la nomination d’un directeur de la rédaction prévu dans l’accord d’indépendance », signé fin 2007 entre les Échos et LVMH.

« Ce droit permet normalement aux journalistes d’avoir leur mot à dire sur le candidat proposé par l’actionnaire », explique la SDJ. « Mais la direction présente une liste de votants dépassant largement le champ de la rédaction permanente des Échos (CDI, CDD, apprentis, pigistes réguliers) », selon la SDJ.

Les grévistes redoutent que l’élargissement du corps votant n’entraîne de nombreuses abstentions, qui compteront comme des soutiens au candidat de l’actionnaire. Or, imposer un candidat contre l’avis de la rédaction « constitue une grave menace pour l’indépendance des Échos », qui « n’est pas un luxe », lance la SDJ.

Contacté par l’AFP, le PDG du groupe Le Parisien-Les Échos, Pierre Louette, a expliqué « regretter » la grève, qui « n’est jamais une bonne solution ».

Ce corps électoral « est celui défini par la loi pour les élections professionnelles des représentants du personnel. Pour ma part, je me refuse à opérer un tri entre journalistes votants et journalistes non votants » juste avant un vote prévu d’ici à fin juin, a-t-il expliqué.

Interrogé sur les craintes de la rédaction quant à d’éventuelles ingérences de LVMH, Pierre Louette assure qu’« il n’y a aucun risque ».

Concernant Nicolas Barré, il rappelle qu’il a passé « dix ans dans les mêmes fonctions » et travaille toujours pour le quotidien comme directeur éditorial.

Des craintes concernant l’indépendance éditoriale ont également émergé ces derniers temps au journal Le Parisien, autre titre du groupe, la rédaction ayant retiré sa confiance à la direction en avril.

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