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Pourquoi ces scientifiques ne veulent pas qu’on enlève le plastique des océans

Au sein du continent de plastique, les scientifiques ont repéré une densité de neuston parmi les plus élevées jamais décrites, dont le dragon de mer bleu Glaucus.
Au sein du continent de plastique, les scientifiques ont repéré une densité de neuston parmi les plus élevées jamais décrites, dont le dragon de mer bleu Glaucus.

POLLUTION - En 2050, il y aura plus de plastique que de poissons dans les océans. C’est du moins ce que prévoient certains scientifiques… Et cela inquiète les Nations unies. Les représentants de 175 pays sont réunis jusqu’au vendredi 2 juin à Paris pour rédiger les premières lignes d’un Traité contre la pollution plastique.

L’objectif est clair : réduire le plastique. Il est trop énergivore, produit des déchets en masse et s’infiltre partout dans les écosystèmes sous forme de microparticules. Mais une poignée de scientifiques adressent une mise en garde : ce plastique fait désormais presque partie de la nature. Alors que 15 tonnes de polymères sont déversées chaque jour dans la mer, plusieurs espèces marines ont fini par s’y adapter et s’y développent même largement.

Dans l’océan, du plastique plein de vie

Ne vous méprenez pas, la pollution plastique reste avant tout un vrai fléau pour la vie marine. Toute la chaîne alimentaire est touchée : de la crevette à la baleine, en passant par les tortues. Pour autant un groupe d’espèces que les scientifiques appellent « le neuston » fait figure d’exception. Il s’agit de l’ensemble des organismes, algues, mollusques, cnidaires, qui vivent à la surface de l’eau.

Ces petits êtres flottants se sont particulièrement bien adaptés à leur nouvel environnement pollué. Les scientifiques ont même repéré une quantité de neuston parmi les plus élevées jamais constatées dans le fameux continent de plastique au milieu du Pacifique. On y trouve notamment des prédateurs, dont certains superbes spécimens, tels que le dragon de mer bleu Glaucus et les escargots violets Janthina.

Autre constat : plus on va vers le centre du continent de plastique, plus la quantité de neuston est importante. Un fait surprenant, qui pose la question du nettoyage des océans : faut-il retirer ce plastique de l’eau alors même que la vie s’y développe ?

Un petit groupe de scientifiques a ainsi reproché à l’association Ocean Cleanup de tuer une partie du neuston avec sa méthode de collecte des déchets dans les océans. « Ces projets pourraient priver le monde d’un écosystème entier que nous ne comprenons pas et que nous ne pourrons peut-être jamais récupérer » a ainsi commenté l’écologue américaine Rebecca Helm dans le journal The Atlantic.

Un mélange d’espèces inédit mais pas forcément bienvenu

Le continent de plastique est en effet un vrai laboratoire pour les scientifiques. Les déchets qui le composent viennent du monde entier et amènent avec eux des espèces qui n’auraient jamais dû se rencontrer. Un mélange étudié de près, dont on ne connaît encore que très peu les conséquences biologiques.

Selon une étude, 80 % des espèces vivant dans le continent de plastique viennent des côtes. Elles côtoient désormais des espèces de haute mer. Fascinant. Mais aussi potentiellement très dangereux, pointe Mélanie Ourgaud. « Ces espèces s’introduisent et se propagent loin de leur milieu d’origine. Cela peut déséquilibrer les écosystèmes, apporter de nouveaux virus, perturber la pêche… », met en garde cette océanographe et écologue au CNRS.

Si la question de conserver le plastique déjà présent dans les océans continue de faire débat, la communauté scientifique s’accorde sur un point : il faut arrêter de déverser plus de plastique dans les océans. Pour cela il est nécessaire de prendre le problème à la racine et de freiner drastiquement la production de plastique. C’est tout l’enjeu du Traité sur la pollution plastique en discussion à Paris.

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