Quand les Présidents de la République instrumentalisent l’équipe de France

Alors que les derniers sondages ne lui sont pas vraiment favorables, Emmanuel Macron a vécu une parenthèse enchantée pendant quelques jours avec le succès des Bleus. De son « dab » dans le vestiaire après la finale à la “garden-party” d’hier, petit coup de projecteur sur les relations entre Présidents et joueurs de l’équipe de France.

Emmanuel Macron avec les Bleus à l’Elysée…
Emmanuel Macron avec les Bleus à l’Elysée…

Qu’ont-ils en commun ? Finalement pour tous la même envie de surfer politiquement sur une gigantesque vague de bonheur populaire… Excepté chez François Mitterrand. « Tonton » est au pouvoir lors du premier grand moment footballistique des Bleus, le sacre de l’EURO 1984, mais au contraire de ses successeurs ne cherchera pas à récupérer un sport, à l’époque, nettement moins médiatisé. Lors de l’été 1984, Mitterrand s’affiche discrètement. « Taper dans un ballon ou jouer de l’accordéon n’étaient pas les passions premières de Mitterrand », affirmait Jacques Séguéla.

Dans les années 1980, à l’époque Maire de Paris, Chirac ne s’intéresse pas franchement au football et encore moins au club de la capitale… Le PSG fait partie de ses prérogatives mais il n’est pas intéressant sur un plan politique à l’inverse des Bleus. La France qui gagne et qui le place au centre de toutes les attentions.

La France « Black-Blanc-Beur » de Chirac, arme de séduction massive

En 1998, la communication n’a pas encore tout envahi et pourtant, Chirac et ses proches ont tout anticipé. Chirac – Jospin, tant de choses les oppose et notamment le rapport au peuple. Et à l’heure de la Coupe du Monde 1998, les Français vont assister à un déplacement du duel sur le terrain footballistique. Outre la « garden-party » du 14 juillet 1998 et la starisation des Champions du monde, il y aura aussi cette séquence où Jacques Chirac scande le nom des Bleus à l’annonce du onze de départ lors de la finale à Saint-Denis. L’après-match, l’après-finale pourra, elle, servir d’exemple pendant de nombreuses années encore. Le maillot de l’équipe de France sur le dos, il est dans son monde, participe au bonheur ambiant, rigole avec les joueurs et symboliquement, comme Laurent Blanc, embrasse Fabien Barthez sur le crâne. Lors d’une Coupe du Monde, plus on s’affiche du côté des vainqueurs, mieux c’est. A ce niveau-là, le Corrézien avait une longueur d’avance sur son Premier Ministre. Et concernant la finale 2006, à propos de l’affaire Zidane – Materazzi, Jacques Chirac va adopter une attitude très claire : ON NE TOUCHE PAS A ZIDANE, sorte de demi-dieu national et exemple d’intégration pour la population française d’origine maghrébine, un Zidane qu’il réconfortera chaleureusement

Sarkozy, avait, lui, misé sur la Coupe du Monde 2010 pour se relancer en pleine crise économique, dans un climat plutôt conflictuel nourri par la réorme des retraites. A l’inverse, Knysna et les défaites auront rajouté de la déprime à la déprime.

Enfin, lors de l’EURO 2016, Hollande a été présent sans en rajouter. Maîtrisant parfaitement les codes de la « Hollandie », le journaliste Gérard Davet estime même que « le Président de la République n’en a pas fait assez en juin 2016. Ils font tous de la récupération mais là, beaucoup moins que Chirac à l’époque. Tant Sarkozy que Hollande sont de vrais amateurs de foot et lors de l’EURO, François Hollande s’est contenté d’une visite à Clairefontaine et je ne suis même pas sûr qu’il soit une seule fois descendu dans le vestiaire des Bleus ». Pour François Hollande, la finale perdue de Griezmann et cie à l’EURO 2016 n’aura pas réussi à masquer les vrais problèmes de la société française et notamment concernant le chômage car oui, le football s’invite souvent à l’Elysée mais il ne peut pas non plus faire de miracle.

Antoine GRYNBAUM