La réforme des retraites entre-t-elle dans sa dernière semaine ?

La réforme des retraites entre-t-elle dans sa dernière semaine ? (photo d’illustration prise le 7 février 2023)
La réforme des retraites entre-t-elle dans sa dernière semaine ? (photo d’illustration prise le 7 février 2023)

POLITIQUE - Derniers arrêts avant le terminus ? La réforme des retraites d’Emmanuel Macron, contesté dans la rue et au Parlement depuis sa présentation le 10 janvier dernier, semble entrer dans les dernières encablures de son cheminement. Les embûches encore parsemées çà et là ne semblent pas en mesure de la faire dérailler.

Le gouvernement a publié ce dimanche 4 juin les deux premiers décrets d’application de la réforme, sur le recul de l’âge légal de départ 64 ans et les carrières longues, quarante-huit heures avant la quatorzième journée de mobilisation à l’appel de l’intersyndicale. C’est cette semaine également que les députés débattront de l’abrogation de la réforme, portée par le petit groupe Liot, dans l’hémicycle de l’Assemblée.

Mais cette proposition de loi, vidée de sa substance en commission la semaine dernière, n’aura pas la portée espérée. Dans ce contexte, la suite paraît quelque peu incertaine pour les opposants au projet, sur les pavés ou Parlement, malgré une détermination affichée sans faille.

Quand Laurent Berger acte la défaite

L’intersyndicale aura l’occasion de démontrer à nouveau son unité, mardi 6 juin, plus d’un mois après leur dernier raout dans la rue pour la fête des travailleurs. Quelque 250 actions sont prévues partout en France. Elles devraient réunir 400 000 à 600 000 personnes, selon les autorités. Des grèves sont également annoncées chez les électriciens et gaziers ainsi que dans les transports ferroviaires et aériens, avec un tiers des vols annulés au départ d’Orly.

Malgré une mobilisation qui n’approchera pas le record atteint le 7 mars (1,28 million de participants selon la police), les syndicats espèrent des chiffres élevés, après un 1er-Mai réussi, et ce alors que le mouvement égale désormais celui de 2010 en nombre de journées d’action. L’enjeu apparaît donc conséquent pour les centrales syndicales dans leur rapport de force avec le gouvernement.

Pour le faire plier sur les retraites ? Certains, ouvertement, n’y croient plus. « Bien sûr que le texte s’appliquera le moment venu », a par exemple reconnu Laurent Berger, le chef de la CFDT, qui quittera ses fonctions le 21 juin, jeudi à La Tribune. Une petite phrase qui semble acter la défaite des opposants au texte.

« La suite dépendra de ce qu’il se passe à l’Assemblée et de la mobilisation du 6 juin »
Marylise Léon, future n°1 de la CFDT, dans
L’Humanité

En réalité, les organisations syndicales s’interrogent plus que jamais sur la marche à suivre pour les semaines à venir. Une quinzième journée de manifestation pourrait-elle être décidée après le 8 juin ? Sans l’exclure, la numéro 2 de la CFDT Marylise Léon préfère pour l’heure ne pas répondre. « La suite dépendra de ce qu’il se passe à l’Assemblée nationale et de la mobilisation du 6 juin, que nous espérons massive », a-t-elle affirmé à L’Humanité vendredi.

Cyril Chabanier, président de la CFTC – une autre organisation dite « réformiste » qui expliquait, mi-mai, que le 8 juin serait probablement « le dernier combat » de son syndicat–, laisse lui aussi planer le doute en indiquant ne pas « tourner la page. »

Une lutte contre la réforme des retraites qui passera donc, deux jours plus tard, par l’Assemblée nationale, pendant la niche parlementaire du groupe Liot. Sauf retournement de situation, la présidente Yaël Braun-Pivet devrait invoquer l’article 40 pour déclarer irrecevable les amendements visant à revenir sur le nouveau couperet des 64 ans. C’est ce que la titulaire du Perchoir a laissé entendre la semaine dernière, expliquant qu’elle prendrait ses « responsabilités » sur un texte qui ne « doit pas » être débattu.

D’autres options… mais plus tard

De quoi siffler la fin de la partie ? Cette manœuvre n’empêchera pas les discussions enflammées au Palais Bourbon, mais elle privera les députés de vote, au grand dam de beaucoup. « Un pur scandale démocratique », a par exemple fustigé Sophie Binet, ce dimanche, sur BFMTV, à l’unisson des responsables syndicaux et politiques rétifs à la réforme. Tous mettent la pression sur la présidente de l’Assemblée, avec bien peu de succès.

Restent alors plusieurs outils. On parle de recours devant le Conseil constitutionnel, le Conseil d’État, voire la Cour européenne des droits de l’Homme, à en croire Manuel Bompard, ce dimanche 3 juin sur CNews. L’option la plus en vogue est celle d’une motion de censure, qui pourrait être transpartisane et viserait à faire tomber le gouvernement après l’avoir fait vaciller en mars dernier. Élisabeth Borne avait alors sauvé sa place à neuf voix près.

Mais cette option, agitée par Charles de Courson du groupe Liot ou par les Insoumis, ne décroche pas l’enthousiasme de tout le monde. « Nous, ce que nous demandons, ce n’est pas que ce gouvernement tombe, c’est que la réforme des retraites tombe », a pris soin de rappeler la secrétaire générale de la CGT, ce dimanche. Une formule qui reflète, à certains égards, l’impasse dans laquelle semblent désormais se trouver les pourfendeurs de la réforme.

Dans ce même registre, Manuel Bompard a assuré qu’il « continuer[a]» à se « battre ». « À la fin des fins, s’ils nous empêchent de nous exprimer librement, aux prochaines élections, on défendra le retour de la retraite à 60 ans. » Un nouveau chapitre, une fois la page tournée ?

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