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Roland-Garros: conflit en Ukraine, arbitrage grotesque… les couacs de Roland qui gâchent la fête

Roland-Garros: conflit en Ukraine, arbitrage grotesque… les couacs de Roland qui gâchent la fête

Le psychodrame Sabalenka

La guerre en Ukraine s’est invitée dans le grand tableau féminin du tournoi de Roland-Garros, offrant chaque jour son lot de conflits et de polémiques orchestrées par un public versatile, pas très au fait de l’actualité internationale. C’est ainsi que l’Ukrainienne Elina Svitolina, dont le pays résiste à l’épreuve des bombes et des chars russes depuis plus d’un an, a fait l’amère expérience d’un court qui l’adulait un jour, après sa victoire contre Kasatkina, la sifflait le lendemain, après sa défaite contre Sabalenka, sans qu’elle sache véritablement pourquoi.

Enfin, si, l’Ukrainienne a quand même sa petite idée. Comme depuis le début de la quinzaine et comme le font désormais les joueuses ukrainiennes chaque fois qu’elles affrontent des joueuses russes ou bélarusses, Elina Svitolina a regagné directement sa chaise après la balle de match. Tout sauf une surprise. Et pourtant, Sabalenka a feint de ne pas comprendre l’attitude de Svitolina, la dévisageant au filet, faisant mine d’attendre un geste de sa part, sachant pertinemment qu’il ne viendrait pas. La gêne était palpable sur le court, et la séquence, loin d’être anodine, déclenchait une réaction hostile du public à l’encontre de Svitolina. La position d’attente de Sabalenka au filet a-t-elle mis le feu aux poudres?

"Oui, je crois, malheureusement", a estimé Svitolina, qui s’attendait à être sifflée. L’Ukrainienne ne s’est pas défilée cette semaine, assumant son positionnement, tenant sa ligne d’un bout à l’autre du tournoi. "Ça a commencé avec notre gouvernement qui ne serrait pas la main à l'autre gouvernement. Et vous imaginez celui qui, sur le front, me verrait agir comme si rien ne se passait?", avait-elle expliqué pour justifier son choix de ne pas serrer la main de ses adversaires russes ou biélorusses. Un positionnement qui pouvait être débattu mais qui avait le mérite de la clarté.

Peut-on en dire autant de la n°2 mondiale, qualifiée pour les demi-finales? Les journalistes ont été pour le moins surpris d’apprendre mardi que Sabalenka acceptait enfin le jeu des questions-réponses, un exercice obligatoire auquel elle s’était soustraite après le deuxième tour, s’estimant malmenée par la presse sur le terrain de la géopolitique. Sabalenka avait été dispensée de conférences de presse depuis, avec la bénédiction du tournoi, dans le but de "préserver sa santé mentale". Pour les mêmes raisons, Naomi Osaka avait écopé d’une amende de 15.000 dollars et risquait même l’exclusion. Un deux poids deux mesures regrettable de la part du tournoi?

"Pour avoir rencontré Amélie Mauresmo dimanche, je peux vous dire que la directrice du tournoi était totalement derrière la position de la joueuse et de la WTA en disant: ‘ce n’était pas une conférence de presse (ndlr, après son deuxième tour, la conférence de presse de Sabalenka avait donné lieu à un échange tendu avec une journaliste ukrainienne), c’était une sorte d’interrogatoire, avec cette fameuse journaliste ukrainienne qui faisait son job, a expliqué Eric Salliot dans le dernier épisode du podcast Court n°1. Alors, peut-être que les questions étaient véhémentes, peut-être que ça ne plaisait pas à Sabalenka, mais c’est aussi le jeu des conférences de presse, cela arrive très souvent qu’il y ait des confrontations, ça ne fait pas plaisir. Djokovic s’est emporté contre des journalistes. C’est le jeu. Elle est protégée par Amélie Mauresmo."

Mardi, Sabalenka a donc subitement changé d’avis et choisi de se confronter à des questions plus ou moins embarrassantes s'agissant de sa relation au dictateur Loukachenko. Face aux journalistes, la Bélarusse a livré un discours qui tranchait avec ses récentes prises de parole dans l’affirmation d’une position sur la guerre en Ukraine: "Je ne soutiens pas la guerre, ce qui signifie que je ne soutiens pas Loukachenko, en ce moment." Un "en ce moment" qui laisse libre cours à toutes les interprétations sur la sincérité de ce discours. "Moi, elle ne m’a pas convaincu", lâche Eric Salliot.

Confusion autour du diabète de Zverev

Le "Lion" Alexander Zverev rugit de nouveau cette année. Gravement blessé à Roland l'an passé face à Rafael Nadal, il a retrouvé le sourire lundi soir, après sa qualification tardive pour les quarts de finale. L’Allemand n’a fait qu’une bouchée du Bulgare Grigor Dimitrov et affrontera l’Argentin Tomas Martin Etcheverry ce mercredi après-midi pour une place dans le dernier carré du tournoi. Un joueur à surveiller de près pour l’Allemand, qui devra aussi être attentif à sa propre santé, lui qui est contraint de composer depuis sa plus tendre enfance avec le diabète. Interrogé lundi soir par les journalistes allemands sur la manière dont il gère ce handicap qu’il a longtemps caché, Zverev a expliqué que le tournoi de Roland-Garros ne lui facilitait pas la tâche.

"Sur les tournois ATP, c’est assez simple. J’injecte mon stylo à insuline durant les changements de côté quand j’en ressens le besoin. Ici, à Paris, ce n’est pas autorisé sur le court. Et si je sors du court, ils m’ont dit que ça comptait comme un toilet break. Je leur ai répondu : 'Les gars, on n’a droit qu’à deux pauses par match mais dans une rencontre en cinq sets, je peux avoir besoin de quatre ou cinq piqûres !' C’est nécessaire pour ma santé." La rigidité (ou la méconnaissance) de l’organisation du tournoi au sens large a donné lieu à une scène cocasse au deuxième tour, rapportée par Zverev en personne.

"Un superviseur est entré dans la salle alors que j'allais m’injecter une dose et il m’a dit: 'Non, tu ne peux faire ça! Il faut un docteur!' Je lui ai répondu que ça ne servait à rien, qu’il fallait maîtriser les mesures du trop plein de sucre." Rebelote face à Dimitrov. "Je leur ai proposé de me laisser sortir cinq secondes ou mieux, sur le court. Ils m’ont dit : 'Non, ça fera bizarre…' Ce n’est pas très sensé. Si je n’utilise pas mon stylo à insuline, je me mets en danger. Ils ont répété que c’était bizarre." Devant tant de suspicions, l’Allemand s’est emporté: "C’est quoi le problème? Vous considérez que je me dope?", aurait-il lancé dans une charge ultime. Le manque de souplesse du tournoi de Roland-Garros a été illustré par une autre affaire survenue à l’occasion d’un match de double féminin.

Disqualification polémique: "L'arbitrage dans tout ce qui se fait de plus bête"

Victime d’une terrible injustice dimanche, la Japonaise Miyu Kato était inconsolable lundi, alors qu’elle était censée fêter sa qualification pour les demi-finales du double mixte brillamment obtenue contre la paire brésilienne Stefani-Rafael Matos. Mais la tristesse de la veille ne l’avait pas encore quittée, la disqualification prononcée à son encontre dans la confusion étant trop difficile à digérer.

Pour avoir envoyé involontairement une balle en direction d’une ramasseuse qu’elle ne visait pas, la Japonaise a dû quitter le tableau du double dames sans ménagement. Ce n’était pas la décision de l’arbitre à l’origine, qui avait parfaitement lu la situation et s’était contenté d’adresser un simple avertissement, la balle en question ayant malencontreusement heurté la ramasseuse au niveau du visage.

La frappe n’avait rien d’un geste de colère, Kato répétait simplement un coup qu’elle venait de manquer, ce qui lui permettait par la même occasion de renvoyer la balle aux ramasseurs situés de l’autre du terrain. Malheureusement pour la Japonaise, la jeune ramasseuse ne regardait pas dans sa direction. L’histoire aurait pu en rester là, mais ce sont les cris d’orfraie du public qui ont tout déclenché.

Marie Bouzkova et Sara Sorribes Tormo, les adversaires ont alors aperçu la jeune fille en pleurs et se sont empressées d’en parler à l’arbitre, comprenant qu’elles pourraient peut-être tirer profit des circonstances, même si elles s’en défendent. Leur interpellation de l’arbitre a en tout cas conduit à l’interruption du match, et entraîné l’intervention du juge-arbitre Rémy Azemar, qui se trouvait alors très loin de la scène au moment où l'incident s'est produit.

Sur la base des informations qu’il recueille auprès des cinq protagonistes une fois sur place, dont trois au moins ont une lecture très partielle voire partiale des événements, le juge-arbitre prononce la disqualification de la paire japono-indonésienne formée par Miyu Kato et Aldila Sutjiadi, à la grande stupeur du court n°14. Mais l’indignation soulevée par la séquence et l’attitude peu glorieuse de la paire Bouzkova-Sorribes Tormo a franchi de loin la frontière encadrée par la structure semi-enterrée du court. Car depuis l'incident, Kato a perdu son prize-money et ses points.

"C'est extrêmement sévère, ça n'a rien à voir avec la balle de Djokovic il y a quelques années", a critiqué l'ancien directeur du tournoi, Guy Forget. Gilles Simon a fustigé cette décision sur Twitter: "l’arbitrage dans tout ce qui se fait de plus bête". Ce lundi, Alizé Cornet également offusquée, y est allé de son commentaire acerbe chez nos confrères de L’Équipe: "J'espère que le tournoi va lui rendre son argent. On a atteint un sommet d'injustice. Ça me donne envie de tout casser. L'arbitre a fait une énorme erreur. Il s'est fait influencer par les autres joueuses. Le tournoi devrait présenter ses excuses à Kato."

Alizé Cornet est favorable à l'instauration d'un challenge vidéo pour trancher ce cas parmi tant d'autres, Eric Salliot la rejoint sur ce point: "Je pense que si Rémy Azemar avait vu l'action avec un peu de recul, je pense qu'il aurait conforté l'arbitre dans sa première estimation. Mais c'est valable aussi pour les balles doublées. On a vu 2-3 incidents durant le tournoi, avec des balles qui doublent, et que les arbitres ne voient pas, mais qui change parfois la face d'un set, la face d'un match."

Article original publié sur RMC Sport