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ROLAND-GARROS - JEU DECISIF - Ce sentiment qui s’appelle la peur

Elle peut surgir à tout moment et saper les rêves des plus ambitieux. Kiki Mladenovic en a fait la douloureuse expérience lors de son entrée en lice. Mais s’en est finalement sortie par un trou de souris. Bravo !

C’est un sujet tabou sur le circuit. Les joueurs et joueuses n’aiment pas en parler avec la presse. Cela reste enfoui dans l’intime, dans les conversations avec le coach ou le préparateur mental, si on a les moyens de s’en offrir un. Mais pour le monde extérieur, ça n’existe pas. Comme une maladie honteuse, dont on ne peut pas parler.

C’est pourtant le coeur du problème de ce sport individuel où il ne faut pas simplement se « battre » avec l’adversaire. Pour commencer, il faut démêler son écheveau personnel. Avec le temps, j’ai pu parler à bâton rompu de ce sujet avec des joueurs retraités. Et bien oui, m’ont-ils dit, quand on rentre sur le Central de Roland-Garros, et même si l’on a déjà un peu d’expérience, on a la trouille au ventre. La vraie. Et plus encore, évidemment, quand on est Français. Souvent, l’idée d’être ridicule, d’être incapable de tout simplement développer son jeu, est là, fichée dans un coin dans la tête. Des pensées négatives qui prennent toute la place, vous brouillent la vue, vous plombent les gambettes et vous transforment le bras en enclume.

C’est exactement ce qui est arrivé à Kristina Mladenovic ce lundi pour ses débuts dans ces Internationaux de France. Et comme un malheur n’arrive jamais seul, la numéro un française était touchée au dos. Mais comment ne pas penser que tout était lié, de toute façon ? De la tension naissent les blocages surtout si le terrain est favorable. Mladenovic avait déjà souffert dans cette zone lors du tournoi de Madrid.

Comme on l’a si souvent vu sur ce court avec Amélie Mauresmo, Kiki était incapable de laisser partir son bras, de bouger ses jambes de façon suffisamment dynamique. Elle s’est alors retrouvée embarquée dans une vraie galère, face à Jennifer Brady, 88e mondiale, une Américaine super baraquée dotée d’un coup droit maousse.

J’avoue avoir été étonné de cette situation. Car Mladenovic aime les grands événements, les grands courts, la lumière, les défis et ne cache pas ses objectifs. Mais à Roland-Garros, c’est autre chose pour une petite Bleue dont on attend monts et merveilles. Elle-même ne devait pas s’attendre à réagir ainsi d’ailleurs.

Ce match, qu’elle a fini par gagner avec le coeur, les moyens du bord et l’appui des spectateurs, restera sans doute longtemps gravé dans sa mémoire et va forcément lui servir pour la suite de ce tournoi et de sa carrière. Allez, on va dire que c’est un mal pour un bien. On le lui souhaite, en tout cas !

Christophe Thoreau
Photo – AFP