Roland Garros sans Nadal : pour Michaël Llodra « ils sont nombreux à attendre leur moment en embuscade »

Grand spécialiste du double, Michaël Llodra est devenu depuis sa retraite annoncée en 2015 consultant et commentateur de la quinzaine de Roland Garros pour France Télévisions.
Grand spécialiste du double, Michaël Llodra est devenu depuis sa retraite annoncée en 2015 consultant et commentateur de la quinzaine de Roland Garros pour France Télévisions.

ROLAND GARROS - À la fin il n’en restera aucun ? C’est un Roland-Garros pas comme les autres qui s’ouvre ce week-end porte d’Auteuil à Paris. Une édition où la terre battue pourrait même se muer en marc de café et livrer quelques prédictions sur l’avenir du tennis masculin. Car cette année, les grands patrons brillent par leur absence.

Du célèbre Big Four, (Federer, Nadal, Murray et Djokovic), qui surdomine les tournois du Grand Chelem depuis plus d’une décennie, il ne reste pour cette 122e édition des Internationaux de France que Novak Djokovic. Rafael Nadal, roi incontesté de la terre battue depuis 2005, est blessé et a déclaré forfait.

De quoi faire dire à Michaël Llodra, tennisman français aujourd’hui à la retraite mais reconverti en consultant et commentateur du tournoi pour France Télévision, que Roland Garros pourrait amorcer une mue, 40 ans après la victoire de Yannick Noah.

Le HuffPost : On s’attend cette année à un tournoi masculin de transition, est-ce un sentiment que vous partagez ?

Michaël Llodra : Je parlerais d’une année particulière plutôt que de transition, surtout sans Rafael Nadal. Un monument du tennis mondial qui ne jouera pas cette année son tournoi fétiche après l’avoir remporté à 14 reprises depuis 2005. Après c’est certain qu’en son absence, le tableau masculin devient bien plus ouvert.

Malgré la présence de Djokovic cette année, cette édition 2023 peut-elle préfigurer de ce que pourrait être cette nouvelle ère du tennis masculin sans le fameux « Big Four » ?

Effectivement. Ils ont croqué 80 % du butin pendant plus de 10 ans, donc derrière il ne restait pas beaucoup de place. Avant ces quatre-là, le gagnant de Roland Garros changeait pratiquement chaque année. Et jamais un tournoi n’a été autant dominé que sous l’ère Nadal.

D’autant plus qu’en dehors de Novak Djokovic, parmi les favoris, seuls Carlos Alcaraz et Daniil Medvedev ont déjà remporté un Grand Chelem. Donc c’est assez logique qu’au fil du temps, des joueurs comme le Norvégien Casper Ruud ou l’Italien Jannik Sinner finissent par s’imposer dans un tournoi du Grand Chelem, en étant libéré de la place prise par ces monuments du tennis.

Cela veut dire que le gagnant de cette édition se trouve parmi ces nouveaux talents ?

Sans doute. Comme je le disais, le tableau est bien plus ouvert sans « Rafa ». Et on voit progressivement pointer cette génération talentueuse menée par le jeune Carlos Alcaraz, aujourd’hui numéro 1 mondial.

Mais derrière, ils sont nombreux à attendre leur moment en embuscade. On peut citer une nouvelle fois Casper Ruud, mais aussi le Danois Holger Rune, auteur d’une belle saison sur terre battue. Même Stéfanos Tsitsipás, qui n’est peut-être pas autant au premier plan cette saison, a déjà prouvé de quoi il était capable à Roland Garros.

Novak Djokovic n’est pas dans une très grande forme cette saison, mais il garde l’objectif de devenir le joueur le plus titré en Grand Chelem (actuellement 22 titres à égalité avec Rafael Nadal). Est-ce un facteur de motivation suffisant pour s’imposer cette année ?

Vu sa forme physique, on peut effectivement se poser des questions, mais il reste un des plus grands joueurs de tous les temps, de ceux capables de sortir des grands matchs là où on l’attend le moins. C’est un ami, et je peux vous dire qu’avec ce type de joueur, son meilleur niveau se révèle souvent dans ce genre de moments.

D’autant plus qu’Alcaraz n’a encore jamais gagné à Roland. Il n’est pas encore totalement installé, donc « Djoko » a largement la place cette année. Sans oublier qu’il a l’expérience d’avoir déjà remporté ce tournoi à deux reprises.

Mais si vous ne deviez citer qu’un nom parmi les favoris de cette 122e édition ?

Je ne serais pas très original. Pour moi c’est Alcaraz. Mais je mettrais Djokovic pas loin derrière. Avec deux semaines de récupération (il a été éliminé en quart de finale à Rome, le dernier tournoi avant Roland Garros), je me méfierais beaucoup de lui. « Djoko » sera prenable lors des deux premiers matchs, après il aura accumulé trop de confiance pour se faire sortir facilement.

Donc on devra attendre au moins un an de plus pour trouver le successeur de Yannick Noah, vainqueur il y a 40 ans ?

Pour le coup, au niveau du tennis français, c’est le moment de parler d’une année de transition. On est pointé du doigt pour cela, et ça fait longtemps que le premier joueur français n’a pas été classé aussi loin (Ugo Humbert, 38e au classement ATP) avant Roland Garros.

Très honnêtement, depuis le départ de Gilles Simon et Jo-Wilfried Tsonga, c’est compliqué, bien que Gaël Monfils s’accroche encore. Mais la nouvelle génération est là avec un Luca Van Assche ou un Arthur Fils. Ils seront là pour gagner un match, mais sans doute pas bien plus. Mais il faudra les suivre de près dès cette année, surtout avec la proximité du public français. Et puis Roland Garros est fait pour créer des surprises, on ne peut attendre que ça.

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