Publicité

La Russie prépare une offensive pour conquérir l'est de l'Ukraine d'ici mars selon des observateurs

Vladimir Poutine et Valéri Guerassimov.  - Sergei GUNEYEV / SPUTNIK / AFP
Vladimir Poutine et Valéri Guerassimov. - Sergei GUNEYEV / SPUTNIK / AFP

Vladimir Poutine s'accroche à son fantasme. D'après un think tank américain suivant au quotidien l'évolution du conflit, l'Institute For the Study of War (ISW), le président russe a ordonné à Valéri Guerassimov de préparer sans tarder une offensive majeure en Ukraine. Les consignes adressées au général en chef des troupes d'occupation tiennent en un impératif: la possession intégrale des régions de Donetsk et Lougansk dans l'est du pays, déjà annexées par le Kremlin, d'ici mars.

Plus de réseau

Dans son bulletin publié jeudi, l'ISW cite une source au sein du renseignement ukrainien. C'est cet interlocuteur qui assure que l'état-major russe a pour instruction de se rendre maître du Donbass avant deux mois. Mercredi déjà, Andriy Chernyak, représentant de la Direction générale du renseignement du ministère de la Défense ukrainien, avait déroulé un même scénario dans les colonnes du Kyiv Post.

Le groupe de réflexion américain affirme que les troupes déployées par Vladimir Poutine ont commencé à prendre de premières précautions. Ainsi, l'accès internet mobile a été coupé dans les zones qu'elles détiennent. Puis, à compter du 11 février, samedi prochain, c'est l'ensemble du réseau qui devrait être neutralisé.

L'explication est simple: empêcher les communications émanant des portables des soldats russes de dévoiler les mouvements et les plans de leurs divisions. "Les forces russes ont peut-être appris de précédents manquements opérationnels dans la sécurité", note allusivement l'ISW.

On sait notamment que la frappe sur la caserne de Makiivka, qui avait coûté la vie à au moins 89 recrues russes - selon la fourchette basse d'un bilan encore incertain -, avait été permise parce que ces dernières avaient involontairement trahi leurs positions au travers des données cellulaires de leurs téléphones.

Course contre-la-montre

Quant aux moyens humains alloués à cette offensive, les chiffres flottent toujours. Mercredi soir, le ministre de la défense ukrainien, Oleksiy Reznikov, a jugé sur BFMTV que son ennemi avait pu masser un demi-million d'hommes. "Officiellement, ils ont annoncé 300.000, mais quand on voit les troupes aux frontières, selon nos évaluations c’est beaucoup plus", avait-il ponctué, avançant alors le nombre de 500.000 militaires.

Peu importe la mathématique du Kremlin et les luxes de précaution dont il entend entourer cette opération imminente, l'Institute for the Study of War pose que Vladimir Poutine a pu "surestimer" ses forces, surtout dans le temps imparti. L'ISW fait valoir que "42% de l'oblast de Donetsk" sont sous contrôle ukrainien, soit 11.300 km2. De surcroît, le mois d'avril est habituellement lourd de pluies en Ukraine, intempéries sous lesquelles l'offensive russe menace de s'embourber.

Un objectif revu à la baisse

Un aspect supplémentaire renforce encore le sentiment d'urgence: l'arrivée imminente des chars lourds et armements occidentaux pour soulager les pénuries ukrainiennes. Valery Soloveï, ancien professeur à l'Institut des relations internationales de Moscou - chargé de former diplomates et espions selon le Daily Mail qui a relayé son analyse -, a expliqué dimanche soir au cours d'un direct sur la chaîne YouTube du dissident russe Mikhaïl Khodorkovski: "C'est pourquoi c'est la dernière chance de frapper l'Ukraine".

"Mais pas dans l'objectif d'une victoire finale", a-t-il précisé: "C'est très important de comprendre ça. Ce but n'est plus du tout d'actualité. Le but est totalement différent maintenant: terminer la guerre de manière honorable. (...) Il s'agit de conserver un minimum des conquêtes russes. Soit le Donbass, une partie des territoires annexés - mais pas en entier - et la Crimée.

Selon lui, "les Russes n'en espèrent pas plus".

Scruter le sud et l'est

Valery Soloveï a indiqué au même média que Vladimir Poutine avait ordonné à Valéry Guerassimov, général en chef des troupes russes en Ukraine, de lancer son assaut dans "plusieurs directions". Oleksiy Reznikov, lui, a dit s'attendre à ce que l'effort russe se porte avant tout dans le sud du pays ou le Donbass.

Mais si, dans l'esprit de Vladimir Poutine, cette offensive doit permettre à la Russie de sauver ses meubles d'ici mars, l'attaque doit bien sûr débuter quelques semaines auparavant. Le ministre de la Défense ukrainien l'imagine se produire dans trois semaines. "Nous pensons que, étant donné qu'ils (les Russes, NDLR) vivent dans la symbolique, ils vont essayer de tenter quelque chose aux alentours du 24 février", a-t-il confié mercredi soir à BFMTV.

Des généraux russes "terrifiés"

Février ou mars, les officiers de Vladimir Poutine redoutent que la date de l'assaut soit de toutes façons prématurée, et craignent d'emmener leurs soldats tout droit dans une énième boucherie. C'est du moins ce qu'a souligné une nouvelle fois Valéry Guerassimov: "L'état-major est terrifié par les instructions du commandant en chef (Vladimir Poutine, NDLR). Je n'exagère pas. Ils sont horrifiés". "Ils ont peur de perdre ce qui leur reste de forces dans le massacre vers lequel l'ordre de Poutine va les entraîner", a-t-il achevé.

Le bilan des pertes russes est déjà effroyable. Il y a une semaine, le chef d'état-major norvégien Eirik Kristoffersen évaluait à la télévision de son pays qu'en additionnant les soldats tués ou blessés au combat côté russe, on "approchait" les 180.000. Une somme qui demeure cependant bien difficile à établir en raison de l'opacité dont le régime de Vladimir Poutine nimbe son "opération spéciale".

Visiblement bien renseignés, les Ukrainiens attendent en tout cas leurs adversaires de pied ferme. Et eux ne semblent pas avoir la main qui tremble. L'ISW relève ainsi dans son bulletin que les généraux ukrainiens voient déjà par-delà la prochaine agression russe et planchent sur leur propre contre-offensive... prévue pour l'été.

Article original publié sur BFMTV.com