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Super Ligue : En 2009 la F1 a vécu le même scénario

F1 Super Ligue
La Super Ligue avortée rappelle un épisode sensiblement proche, il y a plus de dix ans, en Formule 1.

L’histoire de la Super Ligue est une situation qui a déjà eu lieu en Formule 1, durant la saison 2009. Un événement qui a changé beaucoup de choses pour la suite et qui était conté, dans la toute première édition de notre partenaire BUSINESS / Book GP en 2010 (sortie de l’édition 2021, ce 26 Avril).

Juillet 2008, les équipes de Formule 1 lancent la Formula One Team Association (FOTA) avec la volonté de renégocier les Accords Concorde. Ces accords existant depuis 1981, structure le chiffre d’affaires de l’entreprise F1 qui est redistribué aux équipes. A ce moment-là, 25% des sommes revenaient aux écuries. Mais, la crise des Subprimes est passée par là ainsi que la chute des revenus également.

Premier acte : les règlements techniques

La solution de la Fédération International de l’Automobile était de limiter les coûts. Reconnaissant que les changements réguliers des règlement techniques ont provoqué une inflation dans les investissements des équipes depuis le début de la décennie. Dans un premier temps, le moteur étant le principal poste de dépense des équipes indépendantes (jusqu’à 45 millions d’euros à l’époque par saison), est dans le viseur. L’idée était de baisser les coûts à 7 millions d’euros, puis 5 millions d’euros. Puis d’établir un budget en deux temps : un pour la constructrice à 100 millions d’euros et un autre pour les équipes indépendantes de 55 millions d’euros, est proposé.

En janvier 2009, la FOTA demande une hausse des droits télé, après que le nombre d’équipe bénéficiant de la part du gâteau, est passé de 10 à 12 équipes. Bernie Ecclestone dépose à ce moment quatre mines redoutables : Premièrement, il agite l’accord qu’il a signé avec la Scuderia Ferrari jusqu’en 2012, garantissant à l’équipe italienne 150 millions d’euros par saison. Cela permettait de désamorcer toute tentative de championnat parallèle. Deuxièmement, un mémorandum garantissant 50% des revenus de la discipline est proposé aux équipes. Troisièmement, la répartition de ses droits de l’audiovisuel et commerciaux devait être la même, pour toutes les équipes et non plus en fonction des résultats de la saison précédente. Cela devait séduire les équipes indépendantes et polariser la discipline. Enfin quatrième salve, Ecclestone devant l’immobilisme qu’il a provoqué face à ses propositions gèle 190 millions d’euros de redistribution, pour forcer de signer de nouveaux Accords Concorde.

La réaction n’a pas tardé. L’absence de confiance étant de mise entre les parties, la menace du boycott est brandie pour le premier GP de la saison en Australie. Un coup de poker soldé par un échec, pour les équipes de la FOTA. Cinglant sur la situation, la FIA annonce l’idée d’un budget plafond de 34 millions d’euros et une grande liberté technique. Le spectre de la F1 à deux vitesses se profilait.

En mai 2009, la FIA avance l’inscription à la saison suivante au GP de Monaco. Toyota menace de ne pas s’engager pour 2010. Comme Ferrari à la surprise général, puis Renault et Williams suivront. La guerre devient froide. En contre feu, le président de la FIA, Max Mosley, dévoile son règlement technique pour 2010 et surtout que le dommage pour rompre les contrats est fixé à 50 millions par équipe. La FOTA lance un fond privé pour résoudre ce détail.

En juin 2009, une première proposition de paix est mise sur la table des négociations. Cela concerne le budget plafond qui sera de 100 millions d’euros en 2010 et 45 millions en 2011, ainsi qu’un audit de contrôle par un cabinet indépendant et non directement par la FIA. Dernière proposition : étendre les Accords Concorde jusqu’en 2014. Le lendemain de la réunion les équipes de la FOTA annoncent leur championnat parallèle.

Avec le concours du géant du management sportif américain, IMG, un championnat de 17 courses et des deals avec des chaines de télévisions sont développés, à une vitesse laissant croire qu’elle était intégrée à la partie d’échec, entre les parties. Devant la structuration, la FIA reconnait finalement le projet. Une abdication volontaire, car en parallèle, feu le tabloïd anglais, News of the World publie dans sa une, une photo du président de la FIA en tenue Nazi dans une soirée SM. Le scandale force à la démission.

Le budget plafond sera abandonné, mais l’idée de réduire les coûts est restée. Le règlement technique 2010 est lui aussi abandonné, le règlement 2009 est reconduit. La FIA a cédé.

Deuxième acte : les Accords Concorde

En juillet, Bernie Ecclestone fait toujours de la résistance. Il dépose les noms et logo de GP1, ainsi que Formula Grand Prix et Formula GP, pour protéger ses arrières en cas de lancement d’un championnat parallèle par la FOTA (qui n’avait pas de nom). Le retrait de son allié à la Fédération va accélérer la fin. Fin juillet, le constructeur BMW annonce son retrait de la compétition, Toyota aussi. Une semaine plus tard, les nouveaux Accords Concorde sont signés jusqu’en 2012.

Les modalités financières avantagent finalement les équipes de la FOTA. Certes elles toucheront toujours 25% des revenus de la discipline, soit 312,5 millions d’euros à l’époque. Mais une prime pour accélérer la signature a été proposée, pour un total de 322 millions d’euros. The End.

Troisième acte : les conséquences

Cette histoire recomposera à jamais la discipline. Pour 2013, Ecclestone négociera individuellement les Accords Concorde, provoquant une multipolarisation politique. Laquelle ne sera résolue qu’en 2020. La FOTA et la FIA vont créer une commission pour valider les changements techniques, afin de stabiliser les règlements, sources de dépenses massives et un système de contrôle des coûts est mis en place. Cela aura pour conséquence la limitation du nombre de moteur pendant une saison, l’absence des essais privés durant le championnat et la création du moteur que nous connaissons, afin de répondre aux souhaits des constructeurs. Cette parenthèse sera aussi celle d’un projet devant mettre tout le monde d’accord : l’introduction en bourse de la F1. Elle ne sera réalisée qu’en 2016 avec le rachat par Liberty Médias.