"Je voulais rester pour reconstruire", lâche Rory Kockott après son départ de Castres

"Je voulais rester pour reconstruire", lâche Rory Kockott après son départ de Castres

Est-ce qu’on a conscience que c’est la fin d’une aventure de douze ans avec le Castres Olympique?

Il le faut. On a tendance à dire qu’il faut tourner la page. Mais c’est important de savoir l’impact qu’on a eu et celui que les autres ont eu sur toi. Dans tous les sens d’une vie de douze ans dans un club. Avec les copains, coéquipiers, entraîneurs et encadrement.

Pourquoi quittez-vous le Castres Olympique? Vous n’avez pas trouvé d’accord pour continuer l’aventure?

La vérité est loin de ce qu’on peut dire en général. C’est un choix personnel. J’ai demandé au président de ne pas me proposer un autre contrat. A un moment, on ne savait pas si Jérémy (Davidson) voulait garder le même staff. Mais avant qu’une décision soit prise, moi j’ai pris la mienne. Je voulais surtout être honnête et clair dans cette situation. J’ai pris ça très sérieusement et avec beaucoup de recul. Pas avec émotion, mais avec vérité.

Mais quelle était votre volonté à la base?

Dès le début, je savais que j’avais un boulot important à faire ici, avec des responsabilités. Je n’avais pas peur de ça, je voulais relever le défi. Avec énormément d’envie et de volonté. Je savais les ingrédients dont on avait besoin à Castres. Depuis que je suis arrivé à en 2011, on a créé une culture, une vision d’équipe qui, malgré deux années difficiles, a amené une vraie identité sur la durée. Et ce malgré les changements de joueurs. Ça a duré pas mal d’années. De 2013 à 2018, c’est quelque chose dont on a été fiers. Il faut avoir du respect pour ça, se dire que c’est un vrai travail collectif. C’était encore le cas l’an dernier, même si on n’a pas eu le succès qu’on cherchait. Le Top 14 est un défi où on doit avoir quelque chose au-delà du rugby. Si on a que le rugby au milieu des joueurs, ça ne suffira pas. Il faut quelque chose qui va plus loin, de plus profond. Et on ne l’avait pas. On est tous dans le même bateau. Y compris quand on est hors-groupe, blessé, qu’on ne joue pas. Mais parfois on ne ramait pas tous ensemble.

C’est une drôle de réponse à la question de savoir quelle était votre volonté…

Sûrement que je voulais continuer. J’ai tellement investi de temps, des idées et de l’énergie dans mon travail, comme d’autres le font. C’est rare de rester douze ans dans un club. Quand j’en vois qui font six clubs en dix ans, pourquoi suis-je resté ici douze saisons? C’est parce qu’ici il y a le président Revol, un entrepreneur exceptionnel, un passionné de rugby qui a fait quarante ans dans ce sport et qu’avec un homme comme ça on était capable d’être en position de gagner. Je sais qu’il prend les responsabilités de tout le club, même quand ce n’est pas lui qui fait le choix. Mais la façon dont il gère l’humain, il est capable d’être fort dans ces moments. Et c’est ça qui créé l’identité du club. Et avec des joueurs qui ont du cœur, ces deux liés ensemble nous ont permis de vivre des aventures. Alors oui je voulais faire partie de ça, oui je voulais rester pour continuer et peut-être pour reconstruire dans l’avenir. Ce sera peut-être un regret de ne pas l’avoir fait. Mais on aura peut-être aussi jamais la réponse à cette question.

"On a besoin de retrouver l’image du club"

Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné pour arriver à une telle décision alors?

D’autres dans le club ont été différents de ce que je pensais. Quand on peut se dire les choses, on peut construire, avancer. Quand ça devient le business, qu’on se cache les choses, qu’on se fait enlever des réunions, ce n’est plus pareil. C’est un changement d’état d’esprit qui m’a marqué. Dans un club, c’est l’humain qui fait que le système est fort. Malheureusement, les valeurs humaines dont on a besoin dans ce club ne sont pas forcément celles qu’on représente en ce moment. On a besoin de retrouver l’image du club, avec un environnement familial, un état d’esprit différent et du cœur sur le terrain. C’est ça l’identité du Castres Olympique. Ce qu’on a actuellement, ce n’est pas la même.

Quel est votre avenir?

Il y a énormément de possibilité. J’ai fait 18 ans dans le rugby pro. Très jeune, j’ai fait la finale du Super 15 et derrière, ça ne s’est jamais arrêté. Le titre de 2013, la Coupe du monde 2015, nouveau titre en 2018. Toutes ces années où on est dans un cadre. Il y a certaines choses qui me paraissent intéressantes. Au-delà du rugby, où on veut aller, savoir qui on est, construire autre chose. Et voir d’autres choses, que je n’ai pas vu depuis 18 ans. Pour comprendre le côté humain, le management sportif qui permet d’être performant. Allez en Nouvelle-Zélande, aux Etats-Unis, comme Ronan O’Gara a fait par exemple avant d’aller à la Rochelle. Voir des cultures différentes, amenées d’une autre façon.

Pour finir manager d’un club?

Je ne sais pas. On verra

Un dernier mot à dire aux supporters castrais?

Ça c’est une énorme tranche de vie, des relations hors-normes que j’ai créées, au-delà du rugby et pour le reste de ma vie. Et ça c’est important. On dit souvent que le rugby c’est une histoire d’hommes. Et ça le restera. Dans l’équipe, dans la ville, dans le territoire. Ce que ça représente, ça va au-delà du terrain. Et ça permet d’apprendre des choses.

Article original publié sur RMC Sport