Publicité

Woods, l’icône noire

Un homme de couleur s’imposant dans un univers golfique blanc et ultra-conservateur, au-delà de la réussite sportive, la saga Woods met aussi en avant le sport en tant qu’ascenseur social. Retour sur un phénomène à quelques heures du début de la Ryder Cup (du 28 au 30 septembre).

<span>Woods a-t-il été le premier noir à s’imposer dans le monde du golf ? D’autres golfeurs de couleur se sont frayés un chemin dans ce sport qui se démocratise, mais réservé en partie aux gens de la haute société pendant longtemps. Certains afro-américains au début du 20ème siècle, d’autres après la 2ème Guerre Mondiale. En 1964, Pete Brown s’adjuge le Waco Turner Open devenant ainsi le premier vainqueur afro-américain dans un tournoi du PGA Tour. L’histoire raconte qu’il était protégé pendant l’intégralité du dernier tour par Waco Turner, le propriétaire de la chaîne de restaurants du même nom. Il avait tellement peur de la réaction d’une partie du public avec la victoire d’un Noir dans ce sport trusté par les Blancs qu’il portait une arme et disait à Pete Brown : “Ne t’inquiète pas, je te protège“ ».</span>

35 ans plus tard, Woods est le premier joueur de couleur à se hisser à si haut niveau, et met de suite les choses au clair, l’Américain en parlant dans un livre lui étant consacré : « J’ai entendu beaucoup de médias dire que j’étais afro-américain et que j’allais disputer mon premier Masters en tant que golfeur professionnel. Je souhaite que les choses soient claires. Je suis afro-américain par mon père, mais il ne faut pas occulter les origines de ma mère. Lors de l’US Open amateur en 1995, je me suis défini comme “Cablinasien”, un mélange de Caucasien, de Noir et d’Asiatique. Je ne souhaite pas que l’on me considère uniquement comme un Afro-Américain. Ce n’est pas moi ».

Au golf avec Jordan et Barkley

A vrai dire, 2 joueurs de couleur vont partager au plus près ses premières années de golfeur professionnel : Michael Jordan et Charles Barkley pour des parties de golf entre « copains ».

Journaliste golf, Jean-Louis Tourtoulon évoque cette relation en clair-obscur : « Woods était fan de Barkley et Jordan. Tiger était timide et Jordan l’a dévergondé. Ils sortaient en boîte de nuit ensemble. Woods ne savait pas comment aborder les filles, et l’ancien joueur des Bulls lui a donné un conseil : “Tu n’as qu’à leur dire que tu t’appelles Tiger Woods“. Michael Jordan avait une mauvaise influence. Il jouait beaucoup au casino, et a transmis le virus à Woods. Et quand Tiger a rencontré ses difficultés extraconjugales, il a décidé de couper les ponts avec les 2 stars du basket. A l’époque, Barkley n’a pas trop compris pourquoi, mais aujourd’hui, la relation se serait réchauffée avec le propriétaire des Charlotte Hornets ». Outre-Atlantique, Ed Sherman a écrit dans le Chicago Tribune que l’amitié entre Jordan et Woods avait été fabriquée dans le paradis imaginé par Nike. Le golf va-t-il s’ouvrir encore plus aux joueurs de couleur ? « Je pense que cela va rester conservateur aux Etats-Unis », observe Tourtoulon. « A part Woods, il n’y a pas beaucoup d’autres noirs, un peu Tony Finau (présent dans l’équipe américaine de Ryder Cup). Woods et son père ont tenté de faire des choses à travers leur fondation. Tiger avait décidé d’y injecter un million de dollars, dévolu pour le golf chez les minorités. Que des noirs deviennent caddies, puis se mettent au golf… Mais l’argent a été mal géré, et c’est resté sans lendemain ». Icône noire ou pas, Woods pourra toujours évoquer le sujet avec le premier Président noir des Etats-Unis, Barack Obama, qu’il a rencontré à la Maison Blanche en 2009, et avec lequel il a encore tapé la « balle » mi-janvier.