JEU DÉCISIF - L’ITF vous prie de bien vouloir assister aux funérailles de la Coupe Davis, la cérémonie aura lieu (etc…)

RIP, donc, la Coupe Davis et une certaine idée du sport. Bonjour la Dollars Cup. Ne restent que nos souvenirs…

Parce que je suis d’une nature optimiste, je m’étais mis à y croire, ces derniers jours. Quelques indiscrétions nous mettaient du baume au cœur, et puis les cinq pays les plus lourds en terme de voix n’étaient pas d’accord (trois contre, deux pour, dont la France), l’Asie demeurait mystérieuse…

Bref de quoi se dire qu’avec, pourquoi pas, une prise de conscience tardive de quelques-uns, le pire était évitable. Il n’en a rien été. La réforme pour une Coupe Davis reformatée a été adoptée à 71,4%. Circulez y’a rien à voir ! Messieurs dames les romantiques, amoureux de l’histoire du jeu et de cette épreuve, bande d’ineptes passéistes, aveugles aux contraintes économiques, naïfs déconnectés du monde réel, passez votre chemin ! Et vous allez voir ce que vous allez voir ! Avec notre pluie de dollars made in Kosmos/Piqué/Elisson (ce dernier ayant déjà bien plombé la Coupe de l’America), qui va ruisseler dans le monde entier, la face de notre sport va changer et la Coupe Davis sur une semaine en un lieu unique, en fin de saison, avec des trois matches de deux sets par rencontre, sera notre navire amiral, et peu importe que l’ATP, réactive et vicieuse sur ce coup, organise à partir de 2020, une épreuve similaire six semaines plus tard, revival de sa Word Team Cup ! L’ITF qui a souvent tiré le diable par la queue va désormais pouvoir péter dans la soie avec ses trois milliards de dollars sur 25 ans. Mais pour cela, il lui aura donc fallu sacrifier son épreuve phare. Il fallait y penser. Il fallait oser.

Oui, la Coupe Davis avait pris quelques rides et il fallait lui redonner un second souffle. Mais une deuxième vie qui ne passait évidemment pas par une réforme aussi radicale, tuant la nature même de ce rendez-vous âgé de 118 ans : les rencontres home/away. L’ITF le sait tellement bien qu’elle a inventé en catastrophe un premier tour, en home/away justement, offrant à douze équipes la possibilité de se qualifier pour la déjà maudite phase finale sur une semaine. Quelle hypocrisie et quel aveu !

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Je n’aime pas enfiler le costume du conservateur mais là franchement, lorsque le sport, celui que j’aime par dessus tout, se retrouve autant perverti par l’argent, je me sens complètement étranger à ce monde. Dans l’esprit et la démarche, ce vote nauséabond de l’ITF, très ancien monde, me fait penser à celui de la FIFA qui a fait passer la Coupe du Monde à 48 équipes et l’organisera au Qatar en 2022. C’est grotesque, tout le monde le sait, y compris les premiers concernés, mais on ferme les yeux, on se bouche les oreilles, on se pince le nez et on se remplit les poches. Business is business.

La Coupe Davis, ai-je besoin de le rappeler, c’est une histoire (et quelle histoire en France !), des valeurs, et pour les joueurs, l’envie d’en découdre avec pour motivation principale, la défense du maillot national, devant les siens ou face à un public hostile, l’envie d’y vivre des sensations à nulles autres pareilles, uniques dans une carrière, sans penser à l’argent et aux points ATP. Bref, une certaine idée du sport a été balayée d’un revers de main par ceux qui en sont les responsables. C’est tellement gros que je n’arrive pas à y croire…

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